vendredi 7 mars 2008

Lithinée

A Verviers, on buvait de la lithinée.

Chez mes cousins des Hougnes, on ne buvait pas l’eau du robinet comme ça. On y ajoutait de mystérieux sachets de lithinée.
Rituel bizarre pour nous qui étions habitués à une eau particulièrement pure, descendant tout droit du plateau des Hautes Fagnes.
D’autant plus que la leur aussi venait des Fagnes… mais, distribuée dans de vieilles tuyauteries en plomb elle était pratiquement imbuvable. Tant pour son goût détestable que par sa charge de métaux délétères.
Mais, poison ou pas, à l’époque, on buvait encore bien de l’eau du robinet. Elle n’était pas encore – comme aujourd’hui – tant saturée en chlore que l’on a l’impression de boire de l’eau de javel !

jeudi 6 mars 2008

Kepi

Sur les vieilles photos, les gendarmes portaient un képi ridicule, de forme indéfinissable, et bien plus haut que sa version actuelle.

Ridicule, c’est vrai, mais les couvre-chefs insolites font bien partie du charme des vieilles photos, et les inscrivent immédiatement dans leur époque.
Je ne me rappelle plus l’avoir vu sur la tête d’un gendarme, c’est vrai.
Mais par contre, une des saynettes de la remise des prix alors que j’étais en maternelle, présentait bien la chanson des petits gendarmes. Et ils portaient bien des imitations en carton de tels képis.
Et c’est surtout la photo de ce couvre chef qui a marqué ma mémoire. De rois ou de ministres, d'événements dramatiques ou de crimes. Des grandes grèves de 60 peut-être aussi.
Quick et Flupke étaient associés au casque du gendarme ? Notre génération sera peut-être un jour associée à ce képi.

mercredi 5 mars 2008

Juke-box

Tous les 45 tours récents étaient présents dans le juke-box de la piscine.

Dans les cafés d’alors, il n’y avait pas de musique de fond. Pas de radio, pas de télévision allumée en permanence.
Alors parfois, quelqu’un se dirigeait vers le juke-box. Enfournait quelques pièces. Sélectionnait ses morceaux. Et retournait à sa place.
Pour nous les gosses, ce n’était pas tant la musique qui nous attirait que la précision de la mécanique qui se mettait en route. Un bras prélevait le 45 tours, le posait sur le tourne disque dans le bon sens (eh oui, un 45 tours, comme un 33, avait deux faces) et la musique commençait. A la fin du morceau, le disque était rangé à sa place et le suivant le remplaçait.
Pas besoin de Wurlitzer somptueux, n’importe quel juke-box était comme un miracle de technologie, comme apporté là par quelque civilisation extra-terrestre.
Quant aux morceaux. Je ne me souviens que de variété française. Sirupeuse à souhait … « Pour un petit tour, au petit jour, entre tes draps… pour un petit tour, au petit jour, entre tes bras… la, la, la, lala, la lalala… » Ou plus animée « Si j’avais un marteau… » … Que de toute manière nous n’entendrions jamais à la maison.

mardi 4 mars 2008

Interlock

Interlock, dralon, nylon, velours, jersey, pilou, tergal,…

Ce sont les sept qui me viennent immédiatement à la mémoire. Mais nous en connaissions d’autres, des noms de tissus.
Il est vrai que notre mère – comme tant d’autres à l’époque – cousait tout ou partie de nos vêtements. Et que mon père, en bon Verviétois, avait fait des études textiles.
Mais ce n’était pas tout. Les vêtements n’étaient pas simplement des objets qu’on achetait, qu’on utilisait si peu de temps, et puis que l’on jetait.
Faits à la maison, ou hérités d’un cousin plus âgé, même neufs ils avaient déjà parfois une histoire et gardaient une origine. Made in China ne figurait alors sur aucune étiquette. Ils venaient donc bien de quelque part, et surtout de quelqu'un. Comme les costumes de mon père, taillés sur mesure. Un luxe aujourd'hui. La norme à l'époque.

lundi 3 mars 2008

Heyes

Le 6 janvier, nous les enfants allions faire les heyes de maison en maison.

Pourquoi faut-il donc abolument que les enfants d’aujourd’hui emboitent le pas aux petits Américains pour copier leurs, très commerciales, coutumes de halloween. Revêtent des costumes de supermarché. Et tentent d'imiter péniblement ce qu'ils ont vu - en version doublée évidemment - dans les films.
Pour notre part, chaque année, le 6 janvier nous ne manquions pas d’ailler heyi (ou faire les heyes).
Sur le pas des portes, dans le soir qui tombe si tôt à cette époque, nous chantions – en wallon naturellement - notre chanson. «Binamé nosdames no v’nan heyi…» et la suite à l’avenant. La chanson disait que c’étaient les rois mages qui nous avaient envoyés - ou, quand nous serions plus grands, une version légèrement modifiée, prétendant que c'était plutôt l'abbé Wimbomont qui nous envoyait, responsable des collectes pour les missions, et grand "bribeux" de tous les instants -.
En retour, nous recevions quelques chiques, si rarement, une pièce de monnaie - pas vraiment appréciée -.
Et si j'ai longtemps cru que heyi était synonyme de mendier... l'Internet m'a enfin démenti, m'apprenant que les "heyes" c'est l'équivalent wallon des "Christmas carols" anglais, les chants de et autour de la Noël.
Mais j'ai été plus heureux encore lorsqu'un jour, il y a une bonne dizaine d'année, j'ai pu voir une photo de gosses suivant exactement la même tradition. Et s'en allant de maison en maison ce même 6 janvier. C'était dans le Standaard magazine. Et cela se passait dans la campagne flamande. Me laissant donc croire que le petit Flamand pourrait partager certaines coutumes avec le petit Wallon... malgré tous les stupides discours séparatistes, ratachistes, racistes et nationalistes.
Et que les particularités locales seront donc un jour peut-être l'occasion de rencontres fertiles plutôt que de divisions stériles !

dimanche 2 mars 2008

Gai

J’ai bon, c’est gai !

Riez. Riez si vous voulez. Grand bien vous fasse.
J’ai bon vous fait rire… et gai est pour vous synonyme d’homosexuel ? Après notre vilain accent nous faudra-t-il à son tour renier tout à fait notre langue pour la conformer à l’idéal parisien ?
Les localismes, les accents et les patois sont comme des épices pour la bouche et les oreilles. Enlevez les et vous consommerez une langue surgelée ou en conserves. Combattez-les, et c’est le sel que vous supprimez de tous vos plats. Méprisez-les, et vous vous condamnez en même temps que nous à l’éternel fast-food de la pratique du bon français de Paris !

Je garde donc mon c’est gai, pour dire que je m’amuse, que je suis bien, que j’ai bon. Je le garde parce je m’y sens si bien que j’y reviendrai si on me le permet. Je le garde enfin pour la simplicité de la déclaration. Que voudriez vous que je vous dise à la place : c’est amusant ? c’est plaisant ?
Non. C’est gai !

samedi 1 mars 2008

Farde

Pour un fin dossier, ne dites pas chemise, dites farde, et pour une cartouche de cigarettes, dites farde aussi.

Google me propose d’essayer aussi classeur ! Mais un classeur, c’est plus gros. Une farde, c’est fin, compact. Et franchement, je préfère farde.
En plus, farde, c’est un mot pour faire rêver et voyager. C’est un mot arabe pour un colis porté par les animaux de bât ! Du tabac, du papier, rien que des matières précieuses et magiques.
Laissons donc les cigarettes françaises être livrées très militairement dans des cartouches… et les feuilles volantes de leurs petits élèves être ordonnées strictement dans des classeurs… Chez nous l’un et l’autre continueront je l’espère à nous être livrés par des chameliers, dans des emballages aux odeurs de miel, d’épices et de soleil !