mercredi 25 juin 2008

Nicolas (Saint)

La fête à cadeaux, c’était la Saint Nicolas. Uniquement.

Aujourd’hui c’est cadeaux à la Saint Nicolas, cadeaux à la Noël, et re-cadeaux pour l’anniversaire. Les plus assidus n’oublient pas non plus les cadeaux de Pâques en attendant qu’un jour on en offre encore pour Halloween et la fête nationale !
Pour nous, Saint Nicolas, c’était la fête. J’entends, celle où on recevait des cadeaux.
Pour les anniversaires ? Une voiture modèle réduit, un animal miniature pour notre zoo. Mais surtout un gâteau. Un quatre quart pour moi.
A Noël ? Des mandarines – on n’en avait pas à d’autres moments -, des printen – un délicieux biscuit fabriqué en Allemagne -, un cadeau collectif aussi – un jeu de société par exemple -, et c’était tout.
Des cadeaux aussi pour les grands événements de la vie : la première communion (la petite communion, ou communion privée comme on disait), la communion solennelle (la grande communion). D’événements importants, il n’y en avait pas d’autres pour les enfants.
Aux autres fêtes ? Quelques bonbons. A Pâques on recevait des œufs – je veux parler principalement de ces choses ovales que pondent les poules. A l’époque, à Pâques, on mangeait surtout ça. Pas tellement d’imitations en chocolat ! - ; le nouvel an, on se rendait à peine compte que c’était une fête ; Halloween n’avait pas encore été importé.

Il nous restait donc Saint Nicolas. Le 6 décembre pour ceux qui l’auraient oublié !
Souvent, nous l’avons fêté la veille au soir. Pour de simples raisons pratiques, mais mes parents s’arrangeaient toujours pour créer quand même la surprise. Pour pouvoir mieux en profiter surtout. Profiter surtout d’une bonne nuit sans l’attente du matin.
L’école commençait un peu plus tard… et sur un rythme et un ton qui n’était pas vraiment celui de tous les jours. Le 6 décembre, c’était une sorte de jour de vacances en classe.

mardi 24 juin 2008

Martin (Saint)

Le 10 novembre au soir, c’était à Malmédy, les feux de la Saint Martin.

Il y en avait un à Outrelepont, à Floriheid, et le dernier dans le quartier des Grands Prés.
Traditionnellement, on y brulait tous les déchets avant l’hiver… mais les temps avaient changé et il était surtout fait de bois (ce n’est pas grave) et de vieux pneus (j’entends d’ici les hurlements de réprobation dans la salle !).
La nuit tombée, tout le quartier se dirigeait vers son bucher, au son de la fanfare. Les garçons portaient des torches. Les plus petits des lampions. Pas question quand on avait un peu grandi de se promener avec un lampion, on aurait eu l’air de quoi devant les copains !
Le feu mis, les chansons chantées (« C’est’u lu veuye do saint martin, nos ava fini scol’a tin… »), les rondes faites, chacun retournait chez lui. Les enfants recevaient un paquet de biscuits et de friandises du comité de quartier. Prélude à ceux qu’ils recevraient à la Saint-Nicolas, un peu moins d’un mois plus tard.
Le feu, quand à lui, continuait de brûler, et c’était, pour nous les gosses, à celui qui brulerait le plus longtemps. Deux ? Trois jours ? Ou plus encore. Il se racontait que lors de la construction de la cité - vers 60 je crois - notre feu brûlait encore en janvier !

lundi 23 juin 2008

Loriot (Jean-Pierre) et Lenain (Christiane)

Jean-Pierre Loriot et Christiane Lenain nous ont fait passer tant de bonnes soirées.

Ils ne jouaient certainement pas les œuvres les plus intelligentes du répertoire théâtral – pas plus stupides en tout cas que les films et les feuilletons que la télévision nous inflige aujourd’hui -. Mais je leur dois des soirées particulièrement agréables alors, et quelques bouffées de nostalgie aujourd'hui. Du rire. Des sourires. L’impression – magie de la télévision d’alors – d’être dans la salle. Ou que les acteurs venaient jouer dans notre maison.
Le théâtre à la télévision c'était un truc totalement hybride. Mais on aimait !

dimanche 22 juin 2008

Karine et Rebecca

J’ai toujours détesté Karine et Rebecca !

Karine et Rebecca chantaient - entre autres, mais je ne me souviens que de celle là – « Moi je dors avec nounours dans mes bras ». Voix fluette de gamines, de bébé presque. Un des hits des disques demandés du dimanche – ou bien était-ce le samedi – matin. La récompense pour les enfants vraiment sages – ceux qui restaient stupidement à la maison ou jouaient gentiment dans la cour plutôt que de courir les bois et les champs - ? Le droit d’entendre une fois de plus la sirupeuse mélodie avant d’aller se coucher. Nul ! Tellement énervant que plus de quarante ans après mes tripes se nouent à cette pensée.
Et difficile à décrire aussi. Mais essayons les comparaisons.
Karine et Rebecca c’était comme « J’aime la vie » pendant les deux années qui ont suivi la victoire de Sandra Kim au concours Eurovision de la chanson. La tarte à la crème.
Ou bien, comme Folon depuis son retour en Belgique (pardon, en « Valonnie » comme il disait) et plus encore depuis sa mort.
Comme les appels des agents de télémarketing qui voudraient vraiment vous vendre – ou plutôt, offrir à des conditions exceptionnelles - un salon en cuir dont vous n’avez ni besoin, ni envie. Ou ceux des vautours de télé 2 au sujet de votre abonnement téléphone qu'ils peuvent vous remplacer à des conditions particulièrement avantageuses.
Comme la visite hebdomadaire des témoins de Jéhovah si vous avez eu le malheur, une seule fois, de leur ouvrir votre porte.
Karine et Rebecca, c’était tout ça à la fois !

samedi 21 juin 2008

Colombophilie et batellerie

Barcelone, ciel dégagé, lâcher à cinq heures trente. Bordeaux, couvert, les convoyeurs attendent.
Grands malades, trois poutrelles levées ; Hastière, deux vantelles ouvertes.
Les disques choisis, la météo marine, les communiqués colombophiles et ceux pour la batellerie me manquent !

Les cérémonies religieuses avaient leur litanie des saints – Saint Charles… Priez pour nous ! Sainte Martine… Priez pour nous ! Saint Quirin… Priez pour nous ! - ; les cérémonies patriotiques leur litanie des héros – Camille Lemaire… Mort pour la patrie ! François Bovesse… Mort pour la patrie ! Clément Hubert… Mort pour la patrie ! -. La radio avait les siennes !
Les disques choisis ? De Martin pour Viviane, à l’occasion de son anniversaire. De bon-papa José pour sa petite Monique à l’occasion de sa communion. De tonton Louis pour sa nièce préférée… De Lulu pour Bertha : merci pour ton cadeau. Et ça continuait. Dix, quinze personnes avaient choisi le même disque – très quelconque la plupart du temps -. Et la présentatrice lisait ces messages l’un après l’autre. Comme pour enfiler un chapelet de personnes. Ou pour en faire une chanson. Au point que l’on écoutait celle qui suivait de manière distraite. Seul importaient ces noms, toutes ces personnes qui, d’une certaine manière, passaient à la radio.
Les communiqués colombophiles, eux, comme ceux pour la batellerie nous faisaient voyager. Loin avec les pigeons : Nantes, Bordeaux, Amiens… Bien plus près avec les bateaux : Hastière, le canal Albert… Et là aussi, c’était comme une chanson qui disait le voyage. Toute une géographie et une poésie de lieux connus ou pas. Les pigeons qui reviennent. Qui arriveront ou pas au pigeonnier. Les bateaux qui s’en vont, qui partent ou qui passent.
C’était enfin, avec ces derniers, une langue mystérieuse. De poutrelles et de vantelles, qui pouvaient être levées ou abaissées, ouvertes ou fermées ! Et cela semblait être important. Comme des messages codés de radio Londres. Le brouillage en moins !

vendredi 20 juin 2008

Italie et Espagne

D’Espagne ils ramenaient une affiche de corrida à leur nom, d’Italie du verre de Murano. Ceux qui partaient en vacances.

Les vacances ? La plupart préféraient faire le carnaval, et tout le budget loisirs de l’année y passait. Envoyer leurs enfants en colonie de vacances ? Ils n’y pensaient même pas.
Les autres. Ceux qui avaient encore de quoi après le carnaval. Ils regardaient vers le Sud. Ignoraient la France. S’arrêtaient en Italie – qui n’était donc pas seulement le pays d’où venaient nos immigrés – ou en Espagne – où ils fermaient les yeux sur les horreurs de la dictature de Franco -. L’année suivante, ils y retourneraient. Chaque année en Italie. Ou chaque année en Espagne.
Le plus étrange : à part les arènes, l’Espagne, c’était juste une plage, la mer. L’Italie, une plage, la mer aussi. Et la côte belge ? Une plage, et la mer. Mais c’était moins loin, et moins prestigieux !

jeudi 19 juin 2008

Hans Krouf

Si tu n’es pas sage, Hanskrouf va venir te prendre !

Hanskrouf, Hans Kruff, Hans Truff ? C’était le père fouettard chez nous !
Saint Nicolas était terrible évidemment – pour ceux qui y croyaient – puisqu’il ne récompensait que les enfants sages. Et quel enfant pouvait-il prétendre avoir toujours été sage ? Et l’on aurait volontiers voulu nous terroriser à l’idée de rencontrer son assistant.
Qui n’avait pas grand-chose pour lui. Il était noir, à une époque où tout le monde ici était blanc. Il avait – du moins dans certains coins de la Belgique – ce nom à consonance allemande, à une époque où l’évocation de la guerre, et de la cruauté des Allemands, était encore dans tous les esprits. Le père fouettard avait pour lui son qualificatif et ses outils – bâton ou martinet – alors que les châtiments corporels étaient encore d’application dans les écoles et plus encore dans les familles.
Mais au bout du compte, il finissait par nous être bien sympathique. Au moins, il bougeait. Il paraissait vivant, et c’est lui qui faisait tout le boulot de distribution ; Saint Nicolas se contentant de prononcer des âneries qui démontraient qu’il ne nous connaissant pas plus que ça et qu’il s’en foutait complètement.
Et si le père fouettard était chargé de punir, qui pourra prétendre l’avoir jamais vu faire ! Il se contentait de rouler de gros yeux blancs dans sa face noircie. De plus, derrière ses dehors terribles, il semblait qu’il soit un joyeux drille. La preuve ? L’arrivée du bateau de Saint Nicolas aux Pays Bas, que nous avions tous vu à la télévision. Des pères fouettards – qui a dit que les Hollandais ignoraient la démesure ? -, il y en avait des dizaines… se balançant dans les cordages. Et ça ne manquait jamais. Au moins un tombait à la flotte. Ajoutant à l’ambiance de fête et à l’absence de sérieux du personnage.
On voulait nous faire peur avec Hanskrouf, comme avec les histoires d’ogres et de loups. Pas plus, pas moins.
Mais, dans le même temps, personne ne trouvait bizarre à l’époque qu’un monsieur tripote toute la journée des petits garçons et petites filles sur ses genoux !
Et au fait. Je me rends compte maintenant. Il était bien un moment où l’on proclamait : « Je ne crois plus à Saint Nicolas ! »
Bizarre, je n’ai jamais entendu personne dire : « Je ne crois plus au père fouettard ! »