On disait juste « la scierie ». Je vais à la scierie. Ou parfois, à la scierie Closson.
On montait, par la laiterie. Puis à gauche, vers Floriheid et la ville. Pas tout droit, on serait alors arrivé aux trois bosses, puis à la grosse bosse. Et ça, c’était pour l’hiver seulement, pour le traineau. Donc, à gauche ! Il y avait encore un autre bâtiment, avant. Mais ma mémoire me joue des tours. Pas moyen de lui redonner forme. Une usine de machines à laver ? Je rêve peut-être. De machines à coudre ? Il me semble y voir encore « Singer ». Inactive en tout cas. Depuis toujours.
Juste après le coude, séparée de la voie ferrée par la route, c’était donc la scierie. De longs batiments plats à droite et au fond. Et puis, juste devant, le paradis des enfants. Une montagne de déchets !
Des cintres de bois – le modèle tout simple, l’équivalent des stupides cintres en plastique de nos supermarchés – par centaines. Deux cintres cloués ensemble faisaient un cimeterre. Un cintre tout seul pouvait constituer la garde d’une épée.
Des moulures rondes – clouées au bas du cintre, elles en constituaient la partie droite – dont nous faisions des fleurets ou des flèches pour nos arcs.
Des dosses – la dernière planche de sciage, présentant l’arrondi du tronc – et autres déchets plats, nous tenaient lieu de boucliers.
Ainsi équipés, nous étions prêts pour nous lancer dans la fabrication de nos armes… et le lendemain, c’était la guerre enfin. Entre cow-boys et indiens… mousquetaires… chevaliers et templiers… Entre templiers et cow-boys s'il le fallait. Au mépris de l'histoire et pour notre plus grand plaisir.
Pour le prix de trois clous et deux bouts de ficelle, nous avions fabriqué nos jouets. Recyclables et biodégradables !
lundi 30 juin 2008
dimanche 29 juin 2008
Richard
Richard, c’était Richard ! Le fou. Promenant sa longue silhouette et sa tête de rouquin dans les rues de la ville. Faisant rire tout le monde. Et moqué par tous.
Pitoyable. Ridicule et inhumaine. Même bien habillé et nourri comme devait l’être Richard, la vie d’un malade mental dans une petite ville pouvait être terrible !
Pour moi, gamin, il était là depuis toujours. Que ce soit en haut ou en bas de la ville, je le croisais souvent. Et sa démarche, caractéristique, le faisait un peu ressembler au Monsieur Hulot de Jacques Tati. Comme s’il tombait en permanence vers l’avant. Et ne marchait que pour ne pas chuter.
Portant un long manteau. Je vois un loden. Mais ce ne devait pas être le cas. Trop beau. Trop chaud. Mais pourquoi pas ? Laissons-lui donc ce loden que je lui imagine.
Au carnaval, il couronnait sa tête d’un chapeau ridicule. Tyrolien peut-être. Jouait d’une flute ou d’une trompette en plastique, ou bien du mirliton, dans l’une ou l’autre fanfare. Le public riait. Le plaisantait.
Richard était sans âge. La moitié du cerveau d’un enfant de dix ans dans un corps presque vieux. Mais il marchait, marchait.
Puis je l’ai vu quelques fois en colère. Pris d’une rage folle. Marcher plus vite encore. Tenté de frapper le premier enfant à sa portée.
J’ai entendu dire que certains – et certaines – s’étaient mis à le plaisanter de plus en plus grassement, de plus en plus crûment. Le commissaire de police était même passé dans les classes pour expliquer aux enfants qu’ils ne devaient pas suivre l’exemple des adultes.
Je ne sais pas ce qu’il est devenu. Si sa fin aura été meilleure ou pire que le reste de sa vie. Mais, je ne peux m’empêcher quand j’entends Reggiani changer « Priez pour le pauvre Gaspard » - sur un texte de Verlaine – de penser à Richard.
Pitoyable. Ridicule et inhumaine. Même bien habillé et nourri comme devait l’être Richard, la vie d’un malade mental dans une petite ville pouvait être terrible !
Pour moi, gamin, il était là depuis toujours. Que ce soit en haut ou en bas de la ville, je le croisais souvent. Et sa démarche, caractéristique, le faisait un peu ressembler au Monsieur Hulot de Jacques Tati. Comme s’il tombait en permanence vers l’avant. Et ne marchait que pour ne pas chuter.
Portant un long manteau. Je vois un loden. Mais ce ne devait pas être le cas. Trop beau. Trop chaud. Mais pourquoi pas ? Laissons-lui donc ce loden que je lui imagine.
Au carnaval, il couronnait sa tête d’un chapeau ridicule. Tyrolien peut-être. Jouait d’une flute ou d’une trompette en plastique, ou bien du mirliton, dans l’une ou l’autre fanfare. Le public riait. Le plaisantait.
Richard était sans âge. La moitié du cerveau d’un enfant de dix ans dans un corps presque vieux. Mais il marchait, marchait.
Puis je l’ai vu quelques fois en colère. Pris d’une rage folle. Marcher plus vite encore. Tenté de frapper le premier enfant à sa portée.
J’ai entendu dire que certains – et certaines – s’étaient mis à le plaisanter de plus en plus grassement, de plus en plus crûment. Le commissaire de police était même passé dans les classes pour expliquer aux enfants qu’ils ne devaient pas suivre l’exemple des adultes.
Je ne sais pas ce qu’il est devenu. Si sa fin aura été meilleure ou pire que le reste de sa vie. Mais, je ne peux m’empêcher quand j’entends Reggiani changer « Priez pour le pauvre Gaspard » - sur un texte de Verlaine – de penser à Richard.
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R
samedi 28 juin 2008
Quirin
Quirin ? Qui voudrait s’appeler Quirin ?
Et pourtant, il y a bien un Saint Quirin. Mais bon, il y a aussi les Saint Innocents, et la Saint Glinglin… Alors ?
Pour ma part, j’ai souvent – faudrait-il dire toujours – entendu parler d’un certain « Tchâ Quèré Lemère » (Jean Quirin Lemaire). Au point qu’il est devenu une sorte d’ancêtre mythique. Comme si l’on me disait descendant de Rabelais, de Charlemagne… mais eux sont trop connus, figés et figurés dans l’histoire. Plutôt descendant alors de Tchantchet, de Tijl Uylenspiegel ou du Manneken-Pis…
De ces ancêtres qu’on ne tente pas d’inscrire dans le temps – né en telle année, mort en telle autre – ni dans l’espace – habitait à tel endroit -, mais qu’on laisse vagabonder dans l’imaginaire, à toutes les époques (c’est juste un Lemaire), entre ville et campagne (un nom pareil sent la glaise, la tourbe, les bœufs que l’on mène sur la fagne) et nationalités (Belge, Allemand ?).
De ces ancêtres qui, rien que pour celà, mériteraient de transmettre leur prénom aux générations futures !
Et pourtant, il y a bien un Saint Quirin. Mais bon, il y a aussi les Saint Innocents, et la Saint Glinglin… Alors ?
Pour ma part, j’ai souvent – faudrait-il dire toujours – entendu parler d’un certain « Tchâ Quèré Lemère » (Jean Quirin Lemaire). Au point qu’il est devenu une sorte d’ancêtre mythique. Comme si l’on me disait descendant de Rabelais, de Charlemagne… mais eux sont trop connus, figés et figurés dans l’histoire. Plutôt descendant alors de Tchantchet, de Tijl Uylenspiegel ou du Manneken-Pis…
De ces ancêtres qu’on ne tente pas d’inscrire dans le temps – né en telle année, mort en telle autre – ni dans l’espace – habitait à tel endroit -, mais qu’on laisse vagabonder dans l’imaginaire, à toutes les époques (c’est juste un Lemaire), entre ville et campagne (un nom pareil sent la glaise, la tourbe, les bœufs que l’on mène sur la fagne) et nationalités (Belge, Allemand ?).
De ces ancêtres qui, rien que pour celà, mériteraient de transmettre leur prénom aux générations futures !
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Q
vendredi 27 juin 2008
Pousseur (Henry)
Henry Pousseur, né à Malmédy, a l’âge de ma mère.
Visitez Malmédy. Rencontrez ses habitants. Et vous imaginerez difficilement comment un Henry Pousseur peut en être issu.
Faites en de même à Charleville, et essayez, dans la rue, comme ça, de trouver de futurs Rimbaud. Mais au moins, à Charleville, j’imagine que la plupart aura lu, ou entendu, un poème au moins d’Arthur.
Oserais-je imaginer qu’à Malmédy, un jour, tout le monde aura entendu, à défaut d'écouter, toute une œuvre de Henry Pousseur ? Ou serait-il encore trop tôt ? Une bonne gloire locale est-elle nécessairement une gloire morte ? Ou bien la malédiction serait-elle éternelle qui fait que nul n’est prophète en son pays ?
Entre 1961 (il était un peu tôt il est vrai, à trois ans, pour nous abreuver de musique sérielle ou dodécaphonique... mais pourquoi pas ?) et 1972 - mes années d'école là bas -, je trouve bizarre qu’aucun de mes instituteurs, puis de mes professeurs – de musique par exemple ! – ait jamais eu l’idée de nous entretenir d’un fils de la cité qui faisait parler de lui ailleurs.
Les seules fois où j’en ai entendu parler, c’était par plaisanterie. Chacun imaginant une symphonie pour sachets de pain ou un concerto pour nouvelles chaussures et batterie de cuisine.
Résultat. A près de cinquante ans, je n’en sais pas plus sur mon concitoyen !
Visitez Malmédy. Rencontrez ses habitants. Et vous imaginerez difficilement comment un Henry Pousseur peut en être issu.
Faites en de même à Charleville, et essayez, dans la rue, comme ça, de trouver de futurs Rimbaud. Mais au moins, à Charleville, j’imagine que la plupart aura lu, ou entendu, un poème au moins d’Arthur.
Oserais-je imaginer qu’à Malmédy, un jour, tout le monde aura entendu, à défaut d'écouter, toute une œuvre de Henry Pousseur ? Ou serait-il encore trop tôt ? Une bonne gloire locale est-elle nécessairement une gloire morte ? Ou bien la malédiction serait-elle éternelle qui fait que nul n’est prophète en son pays ?
Entre 1961 (il était un peu tôt il est vrai, à trois ans, pour nous abreuver de musique sérielle ou dodécaphonique... mais pourquoi pas ?) et 1972 - mes années d'école là bas -, je trouve bizarre qu’aucun de mes instituteurs, puis de mes professeurs – de musique par exemple ! – ait jamais eu l’idée de nous entretenir d’un fils de la cité qui faisait parler de lui ailleurs.
Les seules fois où j’en ai entendu parler, c’était par plaisanterie. Chacun imaginant une symphonie pour sachets de pain ou un concerto pour nouvelles chaussures et batterie de cuisine.
Résultat. A près de cinquante ans, je n’en sais pas plus sur mon concitoyen !
jeudi 26 juin 2008
Oncle Paul
Relire l’Oncle Paul, c’est comme entrer dans une machine à remonter le temps !
Le papier, un peu rèche. Pas le papier glacé d’aujourd’hui. L’encre qui sentait. Et puis ces histoires, comme racontées par un prof, par un oncle – évidemment – ou comme ces émissions historiques en radio et en télévision. Vite lu. Et on en retenait pas mal…
Mais, si vous voulez vraiment vous replonger dans l’ambiance, je vous conseille Jerry Spring et Buck Dany. C’est radical ! Vous rajeunirez de trente ou quarante années au moins !
Le papier, un peu rèche. Pas le papier glacé d’aujourd’hui. L’encre qui sentait. Et puis ces histoires, comme racontées par un prof, par un oncle – évidemment – ou comme ces émissions historiques en radio et en télévision. Vite lu. Et on en retenait pas mal…
Mais, si vous voulez vraiment vous replonger dans l’ambiance, je vous conseille Jerry Spring et Buck Dany. C’est radical ! Vous rajeunirez de trente ou quarante années au moins !
mercredi 25 juin 2008
Nicolas (Saint)
La fête à cadeaux, c’était la Saint Nicolas. Uniquement.
Aujourd’hui c’est cadeaux à la Saint Nicolas, cadeaux à la Noël, et re-cadeaux pour l’anniversaire. Les plus assidus n’oublient pas non plus les cadeaux de Pâques en attendant qu’un jour on en offre encore pour Halloween et la fête nationale !
Pour nous, Saint Nicolas, c’était la fête. J’entends, celle où on recevait des cadeaux.
Pour les anniversaires ? Une voiture modèle réduit, un animal miniature pour notre zoo. Mais surtout un gâteau. Un quatre quart pour moi.
A Noël ? Des mandarines – on n’en avait pas à d’autres moments -, des printen – un délicieux biscuit fabriqué en Allemagne -, un cadeau collectif aussi – un jeu de société par exemple -, et c’était tout.
Des cadeaux aussi pour les grands événements de la vie : la première communion (la petite communion, ou communion privée comme on disait), la communion solennelle (la grande communion). D’événements importants, il n’y en avait pas d’autres pour les enfants.
Aux autres fêtes ? Quelques bonbons. A Pâques on recevait des œufs – je veux parler principalement de ces choses ovales que pondent les poules. A l’époque, à Pâques, on mangeait surtout ça. Pas tellement d’imitations en chocolat ! - ; le nouvel an, on se rendait à peine compte que c’était une fête ; Halloween n’avait pas encore été importé.
Il nous restait donc Saint Nicolas. Le 6 décembre pour ceux qui l’auraient oublié !
Souvent, nous l’avons fêté la veille au soir. Pour de simples raisons pratiques, mais mes parents s’arrangeaient toujours pour créer quand même la surprise. Pour pouvoir mieux en profiter surtout. Profiter surtout d’une bonne nuit sans l’attente du matin.
L’école commençait un peu plus tard… et sur un rythme et un ton qui n’était pas vraiment celui de tous les jours. Le 6 décembre, c’était une sorte de jour de vacances en classe.
Aujourd’hui c’est cadeaux à la Saint Nicolas, cadeaux à la Noël, et re-cadeaux pour l’anniversaire. Les plus assidus n’oublient pas non plus les cadeaux de Pâques en attendant qu’un jour on en offre encore pour Halloween et la fête nationale !
Pour nous, Saint Nicolas, c’était la fête. J’entends, celle où on recevait des cadeaux.
Pour les anniversaires ? Une voiture modèle réduit, un animal miniature pour notre zoo. Mais surtout un gâteau. Un quatre quart pour moi.
A Noël ? Des mandarines – on n’en avait pas à d’autres moments -, des printen – un délicieux biscuit fabriqué en Allemagne -, un cadeau collectif aussi – un jeu de société par exemple -, et c’était tout.
Des cadeaux aussi pour les grands événements de la vie : la première communion (la petite communion, ou communion privée comme on disait), la communion solennelle (la grande communion). D’événements importants, il n’y en avait pas d’autres pour les enfants.
Aux autres fêtes ? Quelques bonbons. A Pâques on recevait des œufs – je veux parler principalement de ces choses ovales que pondent les poules. A l’époque, à Pâques, on mangeait surtout ça. Pas tellement d’imitations en chocolat ! - ; le nouvel an, on se rendait à peine compte que c’était une fête ; Halloween n’avait pas encore été importé.
Il nous restait donc Saint Nicolas. Le 6 décembre pour ceux qui l’auraient oublié !
Souvent, nous l’avons fêté la veille au soir. Pour de simples raisons pratiques, mais mes parents s’arrangeaient toujours pour créer quand même la surprise. Pour pouvoir mieux en profiter surtout. Profiter surtout d’une bonne nuit sans l’attente du matin.
L’école commençait un peu plus tard… et sur un rythme et un ton qui n’était pas vraiment celui de tous les jours. Le 6 décembre, c’était une sorte de jour de vacances en classe.
mardi 24 juin 2008
Martin (Saint)
Le 10 novembre au soir, c’était à Malmédy, les feux de la Saint Martin.
Il y en avait un à Outrelepont, à Floriheid, et le dernier dans le quartier des Grands Prés.
Traditionnellement, on y brulait tous les déchets avant l’hiver… mais les temps avaient changé et il était surtout fait de bois (ce n’est pas grave) et de vieux pneus (j’entends d’ici les hurlements de réprobation dans la salle !).
La nuit tombée, tout le quartier se dirigeait vers son bucher, au son de la fanfare. Les garçons portaient des torches. Les plus petits des lampions. Pas question quand on avait un peu grandi de se promener avec un lampion, on aurait eu l’air de quoi devant les copains !
Le feu mis, les chansons chantées (« C’est’u lu veuye do saint martin, nos ava fini scol’a tin… »), les rondes faites, chacun retournait chez lui. Les enfants recevaient un paquet de biscuits et de friandises du comité de quartier. Prélude à ceux qu’ils recevraient à la Saint-Nicolas, un peu moins d’un mois plus tard.
Le feu, quand à lui, continuait de brûler, et c’était, pour nous les gosses, à celui qui brulerait le plus longtemps. Deux ? Trois jours ? Ou plus encore. Il se racontait que lors de la construction de la cité - vers 60 je crois - notre feu brûlait encore en janvier !
Il y en avait un à Outrelepont, à Floriheid, et le dernier dans le quartier des Grands Prés.
Traditionnellement, on y brulait tous les déchets avant l’hiver… mais les temps avaient changé et il était surtout fait de bois (ce n’est pas grave) et de vieux pneus (j’entends d’ici les hurlements de réprobation dans la salle !).
La nuit tombée, tout le quartier se dirigeait vers son bucher, au son de la fanfare. Les garçons portaient des torches. Les plus petits des lampions. Pas question quand on avait un peu grandi de se promener avec un lampion, on aurait eu l’air de quoi devant les copains !
Le feu mis, les chansons chantées (« C’est’u lu veuye do saint martin, nos ava fini scol’a tin… »), les rondes faites, chacun retournait chez lui. Les enfants recevaient un paquet de biscuits et de friandises du comité de quartier. Prélude à ceux qu’ils recevraient à la Saint-Nicolas, un peu moins d’un mois plus tard.
Le feu, quand à lui, continuait de brûler, et c’était, pour nous les gosses, à celui qui brulerait le plus longtemps. Deux ? Trois jours ? Ou plus encore. Il se racontait que lors de la construction de la cité - vers 60 je crois - notre feu brûlait encore en janvier !
lundi 23 juin 2008
Loriot (Jean-Pierre) et Lenain (Christiane)
Jean-Pierre Loriot et Christiane Lenain nous ont fait passer tant de bonnes soirées.
Ils ne jouaient certainement pas les œuvres les plus intelligentes du répertoire théâtral – pas plus stupides en tout cas que les films et les feuilletons que la télévision nous inflige aujourd’hui -. Mais je leur dois des soirées particulièrement agréables alors, et quelques bouffées de nostalgie aujourd'hui. Du rire. Des sourires. L’impression – magie de la télévision d’alors – d’être dans la salle. Ou que les acteurs venaient jouer dans notre maison.
Le théâtre à la télévision c'était un truc totalement hybride. Mais on aimait !
Ils ne jouaient certainement pas les œuvres les plus intelligentes du répertoire théâtral – pas plus stupides en tout cas que les films et les feuilletons que la télévision nous inflige aujourd’hui -. Mais je leur dois des soirées particulièrement agréables alors, et quelques bouffées de nostalgie aujourd'hui. Du rire. Des sourires. L’impression – magie de la télévision d’alors – d’être dans la salle. Ou que les acteurs venaient jouer dans notre maison.
Le théâtre à la télévision c'était un truc totalement hybride. Mais on aimait !
dimanche 22 juin 2008
Karine et Rebecca
J’ai toujours détesté Karine et Rebecca !
Karine et Rebecca chantaient - entre autres, mais je ne me souviens que de celle là – « Moi je dors avec nounours dans mes bras ». Voix fluette de gamines, de bébé presque. Un des hits des disques demandés du dimanche – ou bien était-ce le samedi – matin. La récompense pour les enfants vraiment sages – ceux qui restaient stupidement à la maison ou jouaient gentiment dans la cour plutôt que de courir les bois et les champs - ? Le droit d’entendre une fois de plus la sirupeuse mélodie avant d’aller se coucher. Nul ! Tellement énervant que plus de quarante ans après mes tripes se nouent à cette pensée.
Et difficile à décrire aussi. Mais essayons les comparaisons.
Karine et Rebecca c’était comme « J’aime la vie » pendant les deux années qui ont suivi la victoire de Sandra Kim au concours Eurovision de la chanson. La tarte à la crème.
Ou bien, comme Folon depuis son retour en Belgique (pardon, en « Valonnie » comme il disait) et plus encore depuis sa mort.
Comme les appels des agents de télémarketing qui voudraient vraiment vous vendre – ou plutôt, offrir à des conditions exceptionnelles - un salon en cuir dont vous n’avez ni besoin, ni envie. Ou ceux des vautours de télé 2 au sujet de votre abonnement téléphone qu'ils peuvent vous remplacer à des conditions particulièrement avantageuses.
Comme la visite hebdomadaire des témoins de Jéhovah si vous avez eu le malheur, une seule fois, de leur ouvrir votre porte.
Karine et Rebecca, c’était tout ça à la fois !
Karine et Rebecca chantaient - entre autres, mais je ne me souviens que de celle là – « Moi je dors avec nounours dans mes bras ». Voix fluette de gamines, de bébé presque. Un des hits des disques demandés du dimanche – ou bien était-ce le samedi – matin. La récompense pour les enfants vraiment sages – ceux qui restaient stupidement à la maison ou jouaient gentiment dans la cour plutôt que de courir les bois et les champs - ? Le droit d’entendre une fois de plus la sirupeuse mélodie avant d’aller se coucher. Nul ! Tellement énervant que plus de quarante ans après mes tripes se nouent à cette pensée.
Et difficile à décrire aussi. Mais essayons les comparaisons.
Karine et Rebecca c’était comme « J’aime la vie » pendant les deux années qui ont suivi la victoire de Sandra Kim au concours Eurovision de la chanson. La tarte à la crème.
Ou bien, comme Folon depuis son retour en Belgique (pardon, en « Valonnie » comme il disait) et plus encore depuis sa mort.
Comme les appels des agents de télémarketing qui voudraient vraiment vous vendre – ou plutôt, offrir à des conditions exceptionnelles - un salon en cuir dont vous n’avez ni besoin, ni envie. Ou ceux des vautours de télé 2 au sujet de votre abonnement téléphone qu'ils peuvent vous remplacer à des conditions particulièrement avantageuses.
Comme la visite hebdomadaire des témoins de Jéhovah si vous avez eu le malheur, une seule fois, de leur ouvrir votre porte.
Karine et Rebecca, c’était tout ça à la fois !
samedi 21 juin 2008
Colombophilie et batellerie
Barcelone, ciel dégagé, lâcher à cinq heures trente. Bordeaux, couvert, les convoyeurs attendent.
Grands malades, trois poutrelles levées ; Hastière, deux vantelles ouvertes.
Les disques choisis, la météo marine, les communiqués colombophiles et ceux pour la batellerie me manquent !
Les cérémonies religieuses avaient leur litanie des saints – Saint Charles… Priez pour nous ! Sainte Martine… Priez pour nous ! Saint Quirin… Priez pour nous ! - ; les cérémonies patriotiques leur litanie des héros – Camille Lemaire… Mort pour la patrie ! François Bovesse… Mort pour la patrie ! Clément Hubert… Mort pour la patrie ! -. La radio avait les siennes !
Les disques choisis ? De Martin pour Viviane, à l’occasion de son anniversaire. De bon-papa José pour sa petite Monique à l’occasion de sa communion. De tonton Louis pour sa nièce préférée… De Lulu pour Bertha : merci pour ton cadeau. Et ça continuait. Dix, quinze personnes avaient choisi le même disque – très quelconque la plupart du temps -. Et la présentatrice lisait ces messages l’un après l’autre. Comme pour enfiler un chapelet de personnes. Ou pour en faire une chanson. Au point que l’on écoutait celle qui suivait de manière distraite. Seul importaient ces noms, toutes ces personnes qui, d’une certaine manière, passaient à la radio.
Les communiqués colombophiles, eux, comme ceux pour la batellerie nous faisaient voyager. Loin avec les pigeons : Nantes, Bordeaux, Amiens… Bien plus près avec les bateaux : Hastière, le canal Albert… Et là aussi, c’était comme une chanson qui disait le voyage. Toute une géographie et une poésie de lieux connus ou pas. Les pigeons qui reviennent. Qui arriveront ou pas au pigeonnier. Les bateaux qui s’en vont, qui partent ou qui passent.
C’était enfin, avec ces derniers, une langue mystérieuse. De poutrelles et de vantelles, qui pouvaient être levées ou abaissées, ouvertes ou fermées ! Et cela semblait être important. Comme des messages codés de radio Londres. Le brouillage en moins !
Grands malades, trois poutrelles levées ; Hastière, deux vantelles ouvertes.
Les disques choisis, la météo marine, les communiqués colombophiles et ceux pour la batellerie me manquent !
Les cérémonies religieuses avaient leur litanie des saints – Saint Charles… Priez pour nous ! Sainte Martine… Priez pour nous ! Saint Quirin… Priez pour nous ! - ; les cérémonies patriotiques leur litanie des héros – Camille Lemaire… Mort pour la patrie ! François Bovesse… Mort pour la patrie ! Clément Hubert… Mort pour la patrie ! -. La radio avait les siennes !
Les disques choisis ? De Martin pour Viviane, à l’occasion de son anniversaire. De bon-papa José pour sa petite Monique à l’occasion de sa communion. De tonton Louis pour sa nièce préférée… De Lulu pour Bertha : merci pour ton cadeau. Et ça continuait. Dix, quinze personnes avaient choisi le même disque – très quelconque la plupart du temps -. Et la présentatrice lisait ces messages l’un après l’autre. Comme pour enfiler un chapelet de personnes. Ou pour en faire une chanson. Au point que l’on écoutait celle qui suivait de manière distraite. Seul importaient ces noms, toutes ces personnes qui, d’une certaine manière, passaient à la radio.
Les communiqués colombophiles, eux, comme ceux pour la batellerie nous faisaient voyager. Loin avec les pigeons : Nantes, Bordeaux, Amiens… Bien plus près avec les bateaux : Hastière, le canal Albert… Et là aussi, c’était comme une chanson qui disait le voyage. Toute une géographie et une poésie de lieux connus ou pas. Les pigeons qui reviennent. Qui arriveront ou pas au pigeonnier. Les bateaux qui s’en vont, qui partent ou qui passent.
C’était enfin, avec ces derniers, une langue mystérieuse. De poutrelles et de vantelles, qui pouvaient être levées ou abaissées, ouvertes ou fermées ! Et cela semblait être important. Comme des messages codés de radio Londres. Le brouillage en moins !
vendredi 20 juin 2008
Italie et Espagne
D’Espagne ils ramenaient une affiche de corrida à leur nom, d’Italie du verre de Murano. Ceux qui partaient en vacances.
Les vacances ? La plupart préféraient faire le carnaval, et tout le budget loisirs de l’année y passait. Envoyer leurs enfants en colonie de vacances ? Ils n’y pensaient même pas.
Les autres. Ceux qui avaient encore de quoi après le carnaval. Ils regardaient vers le Sud. Ignoraient la France. S’arrêtaient en Italie – qui n’était donc pas seulement le pays d’où venaient nos immigrés – ou en Espagne – où ils fermaient les yeux sur les horreurs de la dictature de Franco -. L’année suivante, ils y retourneraient. Chaque année en Italie. Ou chaque année en Espagne.
Le plus étrange : à part les arènes, l’Espagne, c’était juste une plage, la mer. L’Italie, une plage, la mer aussi. Et la côte belge ? Une plage, et la mer. Mais c’était moins loin, et moins prestigieux !
Les vacances ? La plupart préféraient faire le carnaval, et tout le budget loisirs de l’année y passait. Envoyer leurs enfants en colonie de vacances ? Ils n’y pensaient même pas.
Les autres. Ceux qui avaient encore de quoi après le carnaval. Ils regardaient vers le Sud. Ignoraient la France. S’arrêtaient en Italie – qui n’était donc pas seulement le pays d’où venaient nos immigrés – ou en Espagne – où ils fermaient les yeux sur les horreurs de la dictature de Franco -. L’année suivante, ils y retourneraient. Chaque année en Italie. Ou chaque année en Espagne.
Le plus étrange : à part les arènes, l’Espagne, c’était juste une plage, la mer. L’Italie, une plage, la mer aussi. Et la côte belge ? Une plage, et la mer. Mais c’était moins loin, et moins prestigieux !
jeudi 19 juin 2008
Hans Krouf
Si tu n’es pas sage, Hanskrouf va venir te prendre !
Hanskrouf, Hans Kruff, Hans Truff ? C’était le père fouettard chez nous !
Saint Nicolas était terrible évidemment – pour ceux qui y croyaient – puisqu’il ne récompensait que les enfants sages. Et quel enfant pouvait-il prétendre avoir toujours été sage ? Et l’on aurait volontiers voulu nous terroriser à l’idée de rencontrer son assistant.
Qui n’avait pas grand-chose pour lui. Il était noir, à une époque où tout le monde ici était blanc. Il avait – du moins dans certains coins de la Belgique – ce nom à consonance allemande, à une époque où l’évocation de la guerre, et de la cruauté des Allemands, était encore dans tous les esprits. Le père fouettard avait pour lui son qualificatif et ses outils – bâton ou martinet – alors que les châtiments corporels étaient encore d’application dans les écoles et plus encore dans les familles.
Mais au bout du compte, il finissait par nous être bien sympathique. Au moins, il bougeait. Il paraissait vivant, et c’est lui qui faisait tout le boulot de distribution ; Saint Nicolas se contentant de prononcer des âneries qui démontraient qu’il ne nous connaissant pas plus que ça et qu’il s’en foutait complètement.
Et si le père fouettard était chargé de punir, qui pourra prétendre l’avoir jamais vu faire ! Il se contentait de rouler de gros yeux blancs dans sa face noircie. De plus, derrière ses dehors terribles, il semblait qu’il soit un joyeux drille. La preuve ? L’arrivée du bateau de Saint Nicolas aux Pays Bas, que nous avions tous vu à la télévision. Des pères fouettards – qui a dit que les Hollandais ignoraient la démesure ? -, il y en avait des dizaines… se balançant dans les cordages. Et ça ne manquait jamais. Au moins un tombait à la flotte. Ajoutant à l’ambiance de fête et à l’absence de sérieux du personnage.
On voulait nous faire peur avec Hanskrouf, comme avec les histoires d’ogres et de loups. Pas plus, pas moins.
Mais, dans le même temps, personne ne trouvait bizarre à l’époque qu’un monsieur tripote toute la journée des petits garçons et petites filles sur ses genoux !
Et au fait. Je me rends compte maintenant. Il était bien un moment où l’on proclamait : « Je ne crois plus à Saint Nicolas ! »
Bizarre, je n’ai jamais entendu personne dire : « Je ne crois plus au père fouettard ! »
Hanskrouf, Hans Kruff, Hans Truff ? C’était le père fouettard chez nous !
Saint Nicolas était terrible évidemment – pour ceux qui y croyaient – puisqu’il ne récompensait que les enfants sages. Et quel enfant pouvait-il prétendre avoir toujours été sage ? Et l’on aurait volontiers voulu nous terroriser à l’idée de rencontrer son assistant.
Qui n’avait pas grand-chose pour lui. Il était noir, à une époque où tout le monde ici était blanc. Il avait – du moins dans certains coins de la Belgique – ce nom à consonance allemande, à une époque où l’évocation de la guerre, et de la cruauté des Allemands, était encore dans tous les esprits. Le père fouettard avait pour lui son qualificatif et ses outils – bâton ou martinet – alors que les châtiments corporels étaient encore d’application dans les écoles et plus encore dans les familles.
Mais au bout du compte, il finissait par nous être bien sympathique. Au moins, il bougeait. Il paraissait vivant, et c’est lui qui faisait tout le boulot de distribution ; Saint Nicolas se contentant de prononcer des âneries qui démontraient qu’il ne nous connaissant pas plus que ça et qu’il s’en foutait complètement.
Et si le père fouettard était chargé de punir, qui pourra prétendre l’avoir jamais vu faire ! Il se contentait de rouler de gros yeux blancs dans sa face noircie. De plus, derrière ses dehors terribles, il semblait qu’il soit un joyeux drille. La preuve ? L’arrivée du bateau de Saint Nicolas aux Pays Bas, que nous avions tous vu à la télévision. Des pères fouettards – qui a dit que les Hollandais ignoraient la démesure ? -, il y en avait des dizaines… se balançant dans les cordages. Et ça ne manquait jamais. Au moins un tombait à la flotte. Ajoutant à l’ambiance de fête et à l’absence de sérieux du personnage.
On voulait nous faire peur avec Hanskrouf, comme avec les histoires d’ogres et de loups. Pas plus, pas moins.
Mais, dans le même temps, personne ne trouvait bizarre à l’époque qu’un monsieur tripote toute la journée des petits garçons et petites filles sur ses genoux !
Et au fait. Je me rends compte maintenant. Il était bien un moment où l’on proclamait : « Je ne crois plus à Saint Nicolas ! »
Bizarre, je n’ai jamais entendu personne dire : « Je ne crois plus au père fouettard ! »
mercredi 18 juin 2008
Galapiats
On n’est plus le même homme après avoir subi, de 63 à 66 Thierry la fronde et en 69 les Galapiats !
Les Galapiats. Je me demande franchement qui a pu les inventer.
Le club des cinq – pardon si vous ne connaissez pas, c’était dans la collection verte, ou rose – revus à la sauce post soixante huitarde – c’est Jean-Loup je crois qui à la fin du feuilleton regarde Marion, qui va retourner au Canada, avec des yeux de hareng saur, pour lui exprimer combien elle va lui manquer -.
Le ridicule ne tuant absolument pas, à la fin, on comprend enfin pourquoi il fallait un cow-boy dans la bande. Bruno, dit Cow-boy, sauve le chef des bandits en le tirant d’un marais – la fagne mangeuse d’hommes ! – avec son lasso.
Il tue encore moins le réalisateur qui a choisi d’utiliser des lieux de tournage tellement connus des téléspectateurs belges (l’abbaye de Villers la Ville, Beersel, Stavelot, les Hautes fagnes) qu’on ne pouvait qu’éclater de rire quand au bout d’une course de 100 mètre l’un ou l’autre héros débouchait 100 ou 150 kilomètres plus loin !
Et enfin, il y avait évidemment une chanson générique. Inoubliable. « Ohé les gars, c’est nous, l’aventure nous attend » ou quelque chose du style.
Du grand art je vous dis !
Les Galapiats. Je me demande franchement qui a pu les inventer.
Le club des cinq – pardon si vous ne connaissez pas, c’était dans la collection verte, ou rose – revus à la sauce post soixante huitarde – c’est Jean-Loup je crois qui à la fin du feuilleton regarde Marion, qui va retourner au Canada, avec des yeux de hareng saur, pour lui exprimer combien elle va lui manquer -.
Le ridicule ne tuant absolument pas, à la fin, on comprend enfin pourquoi il fallait un cow-boy dans la bande. Bruno, dit Cow-boy, sauve le chef des bandits en le tirant d’un marais – la fagne mangeuse d’hommes ! – avec son lasso.
Il tue encore moins le réalisateur qui a choisi d’utiliser des lieux de tournage tellement connus des téléspectateurs belges (l’abbaye de Villers la Ville, Beersel, Stavelot, les Hautes fagnes) qu’on ne pouvait qu’éclater de rire quand au bout d’une course de 100 mètre l’un ou l’autre héros débouchait 100 ou 150 kilomètres plus loin !
Et enfin, il y avait évidemment une chanson générique. Inoubliable. « Ohé les gars, c’est nous, l’aventure nous attend » ou quelque chose du style.
Du grand art je vous dis !
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mardi 17 juin 2008
Fagne mangeuse d'hommes
Les hautes fagnes sont dangereuses. On s’y perd. On s’enfonce dans leurs tourbières. On s’égare dans les brouillards et les tempêtes de neige. La fagne est une mangeuse d’hommes !
Il y avait bien les vieilles histoires. Celle de la croix des fiancés – de celles qui finissent mal, dans la nuit et dans la neige – de la chapelle Fischbach et de la baraque Michel – et de la cloche qui devait permettre au voyageur égaré de retrouver son chemin -. Mais tout cela datait de bien avant la naissance de mes grands-parents. Nous n’avions pas plus peur de nous perdre en fagne que de rencontrer le loup du chaperon rouge quand nous parcourions les bois ! Il fallait que cela change !
En 1969, le feuilleton « Les galapiats » y contribua. Le mauvais tombe dans les tourbières et ne doit son salut qu’à l’intervention du cow-boy de service. Les tourbières, c’est en effet terrible ! La marée du Mont St Michel, comparée aux tourbières, ce n’est rien du tout. On se fait avaler en moins de deux. En plus, il y a des plantes carnivores ! Ce n’est sans doute pas pour rien. Avec toute la viande de touristes perdus qui s’y trouve…
Vers la même époque aussi, il faut noter la contribution remarquable de l’université de Liège à une plus juste et plus complète connaissance de l’endroit. Un groupe d’étudiant s’est en effet perdu, en hiver. Perdus pour perdus, au lieu de suivre les vallées – vers les villes – ces idiots ont tenté de rejoindre leur point de départ. Ils furent retrouvés, frigorifiés, dans la nuit. La petite histoire racontait qu’ils n’avaient dû leur salut qu’à un étudiant vietnamien qui avait emporté de la viande séchée (gardée à même son corps, prétendait la rue).
Un feuilleton kitsch… une bande d’idiots en balade… et toute la confiance que nous pouvions avoir dans la fagne s’effondrait – pour les plus crédules en tout cas -. Et la légende est tenace.
Mais, au moins, elle a le mérite de garder la plupart des promeneurs sur les sentiers balisés et d’en tenir éloignés les moins téméraires ! Continuez donc à raconter ces terribles histoires. La fagne vous en sera reconnaissante !
Il y avait bien les vieilles histoires. Celle de la croix des fiancés – de celles qui finissent mal, dans la nuit et dans la neige – de la chapelle Fischbach et de la baraque Michel – et de la cloche qui devait permettre au voyageur égaré de retrouver son chemin -. Mais tout cela datait de bien avant la naissance de mes grands-parents. Nous n’avions pas plus peur de nous perdre en fagne que de rencontrer le loup du chaperon rouge quand nous parcourions les bois ! Il fallait que cela change !
En 1969, le feuilleton « Les galapiats » y contribua. Le mauvais tombe dans les tourbières et ne doit son salut qu’à l’intervention du cow-boy de service. Les tourbières, c’est en effet terrible ! La marée du Mont St Michel, comparée aux tourbières, ce n’est rien du tout. On se fait avaler en moins de deux. En plus, il y a des plantes carnivores ! Ce n’est sans doute pas pour rien. Avec toute la viande de touristes perdus qui s’y trouve…
Vers la même époque aussi, il faut noter la contribution remarquable de l’université de Liège à une plus juste et plus complète connaissance de l’endroit. Un groupe d’étudiant s’est en effet perdu, en hiver. Perdus pour perdus, au lieu de suivre les vallées – vers les villes – ces idiots ont tenté de rejoindre leur point de départ. Ils furent retrouvés, frigorifiés, dans la nuit. La petite histoire racontait qu’ils n’avaient dû leur salut qu’à un étudiant vietnamien qui avait emporté de la viande séchée (gardée à même son corps, prétendait la rue).
Un feuilleton kitsch… une bande d’idiots en balade… et toute la confiance que nous pouvions avoir dans la fagne s’effondrait – pour les plus crédules en tout cas -. Et la légende est tenace.
Mais, au moins, elle a le mérite de garder la plupart des promeneurs sur les sentiers balisés et d’en tenir éloignés les moins téméraires ! Continuez donc à raconter ces terribles histoires. La fagne vous en sera reconnaissante !
lundi 16 juin 2008
Elisabeth (Reine)
La mémoire me joue des tours. J’étais persuadé que la reine Elisabeth était morte en 66 ou 67.
Sûr et certain que j’étais alors en troisième primaire, dans la classe de monsieur Vaneste. En haut de l’escalier à gauche, avec la vue sur la cour de récréation. Eh bien non. C’était le 23 novembre 1965. Dans une autre école, celle du quartier des grands prés. Et avec un autre instituteur, monsieur Bragard.
Mais ce qui est sûr, c’est qu’on a découpé une photo, qu’on l’a collée dans notre cahier – un de ces grands cahiers quadrillés je crois, à couverture souple, vert d’eau ; recouvert de papier bleu -. Qu’on a tracé des lignes, sur la photo, comme pour figurer un mortuaire. Que ce devait être au cours de religion. La photo ? Celle de la veille sur son lit de mort. Macabre ? On ne le ferait plus aujourd’hui ? Eh bien, à l’époque, ça se faisait. Et ça ne gênait personne.
Allez-donc me dire pourquoi c’est juste ce souvenir là qui me revient ? Celui d’une reine que nous ne connaissions pas, sauf par les dessins de nos livres d’histoire, tout pleins encore de l’exaltation de la figure du roi Albert - 1er évidemment ! -. Sans doute parce que, en ces cinquante années qui viennent de passer – en coup de vent – c’est bien la seule reine qui soit morte. Des rois ? Il y en a eu deux (Baudouin et Léopold). Des papes ? J’en ai vu une flopée : j’ai juste raté Pie XII d’une semaine ! Et puis Jean XXIII, Paul VI, Jean Paul I et II. C’est dire si les morts de papes, ça me connaît !
Mais, pour en revenir à Elisabeth, ce qui me réjouit, c’est qu’on a oublié sa guerre ! Alors qu’elle nous était présentée comme la seule guerrière vivante – mortes les Gabrielle Petit, Edith Cavell et autres Mata Hari ; ignorées de tous les résistantes, vivantes, de la seconde guerre mondiale -. Et qu’on ne retient plus d’elle que son amour de la musique. Bel héritage finalement… vous ne trouvez pas ?
Sûr et certain que j’étais alors en troisième primaire, dans la classe de monsieur Vaneste. En haut de l’escalier à gauche, avec la vue sur la cour de récréation. Eh bien non. C’était le 23 novembre 1965. Dans une autre école, celle du quartier des grands prés. Et avec un autre instituteur, monsieur Bragard.
Mais ce qui est sûr, c’est qu’on a découpé une photo, qu’on l’a collée dans notre cahier – un de ces grands cahiers quadrillés je crois, à couverture souple, vert d’eau ; recouvert de papier bleu -. Qu’on a tracé des lignes, sur la photo, comme pour figurer un mortuaire. Que ce devait être au cours de religion. La photo ? Celle de la veille sur son lit de mort. Macabre ? On ne le ferait plus aujourd’hui ? Eh bien, à l’époque, ça se faisait. Et ça ne gênait personne.
Allez-donc me dire pourquoi c’est juste ce souvenir là qui me revient ? Celui d’une reine que nous ne connaissions pas, sauf par les dessins de nos livres d’histoire, tout pleins encore de l’exaltation de la figure du roi Albert - 1er évidemment ! -. Sans doute parce que, en ces cinquante années qui viennent de passer – en coup de vent – c’est bien la seule reine qui soit morte. Des rois ? Il y en a eu deux (Baudouin et Léopold). Des papes ? J’en ai vu une flopée : j’ai juste raté Pie XII d’une semaine ! Et puis Jean XXIII, Paul VI, Jean Paul I et II. C’est dire si les morts de papes, ça me connaît !
Mais, pour en revenir à Elisabeth, ce qui me réjouit, c’est qu’on a oublié sa guerre ! Alors qu’elle nous était présentée comme la seule guerrière vivante – mortes les Gabrielle Petit, Edith Cavell et autres Mata Hari ; ignorées de tous les résistantes, vivantes, de la seconde guerre mondiale -. Et qu’on ne retient plus d’elle que son amour de la musique. Bel héritage finalement… vous ne trouvez pas ?
dimanche 15 juin 2008
Dinitrol
Dinitrol, Rutex, simoniser… et quand ça ne suffisait pas, le mastic, ou pire, changer le plancher. La rouille était la hantise de l’automobiliste.
A peine sa voiture achetée, le propriétaire filait au garage pour faire traiter le châssis. Il y retournait tous les deux ou trois ans pour un traitement de fond, un nettoyage, des injections.
Mais, peine perdue, au bout du compte, la rouille venait quand même. S’attaquait au châssis. Rongeait le plancher, la carrosserie. Par temps de pluie, on roulait les pieds dans l’eau. Et quand on y regardait bien, on pouvait voir la route défiler sous soi… Les garde-boue se faisaient la malle. Les plus petits trous étaient soigneusement traités, au mastic. Les plus gros se couvraient d’autocollants : Standard champion ! Cercle royal mandoliniste. Malmundaria. Un tigre Esso. Et d’autres encore. Plus la voiture pourissait, plus elle se couvrait d’illustrations.
Jusqu’au jour où le contrôle technique prononçait le verdict définitif. L’engin était bon pour la casse !
La rouille, c’était la peste. C’était le cancer. Et si certains y survivaient, aucun n’y échappait.
A peine sa voiture achetée, le propriétaire filait au garage pour faire traiter le châssis. Il y retournait tous les deux ou trois ans pour un traitement de fond, un nettoyage, des injections.
Mais, peine perdue, au bout du compte, la rouille venait quand même. S’attaquait au châssis. Rongeait le plancher, la carrosserie. Par temps de pluie, on roulait les pieds dans l’eau. Et quand on y regardait bien, on pouvait voir la route défiler sous soi… Les garde-boue se faisaient la malle. Les plus petits trous étaient soigneusement traités, au mastic. Les plus gros se couvraient d’autocollants : Standard champion ! Cercle royal mandoliniste. Malmundaria. Un tigre Esso. Et d’autres encore. Plus la voiture pourissait, plus elle se couvrait d’illustrations.
Jusqu’au jour où le contrôle technique prononçait le verdict définitif. L’engin était bon pour la casse !
La rouille, c’était la peste. C’était le cancer. Et si certains y survivaient, aucun n’y échappait.
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samedi 14 juin 2008
Claudine (Merckx)
Claudine faisait les frites pour Eddy avec de la graisse Rési !
Claudine qui ? Mais Claudine Merckx voyons ! Le 4ème personnage de l’Etat – juste après le roi (Baudouin), la reine (Fabiola) et Eddy (Merckx) -. Claudine Merckx faisait donc bien de la publicité pour de la graisse à frites.
Imagine-t-on aujourd’hui, la reine Paola dans une pub, qui annoncerait qu’elle lave les caleçons d’Albert avec Dash ? Ou Carla (Bruni) assurant que les assiettes de Nicolas (Sarkozy) sont plus brillantes avec Dreft ? Barbara (Bush) certifiant que George (W) exige que les sols de la Maison Blanche soient nettoyés avec Monsieur Propre ? Angelina (Jolie) prétendre que son Brad (Pitt) ne se torche qu’avec du papier WC Lotus ?
C’est que nos héros étaient aussi nos familiers. Qui ne vivaient pas vraiment différemment de nous. Mangeaient les mêmes choses. Roulaient dans (presque) les mêmes voitures. Avaient les mêmes activités. Qu’il n’était pas impensable de les croiser dans la rue, ou chez le boucher. Que de suggérer même qu’ils pourraient avoir besoin de gardes du corps vous aurait mené tout droit à l’asile. Ils n’avaient pas pour seule gloire de nous exhiber dans les journaux à scandales, leurs amours aussi tumultueuses que passagères et leur luxe insensé !
Mais maintenant, j’ai des doutes : ne me dites pas que vous ne connaissez pas Eddy Merckx !
Claudine qui ? Mais Claudine Merckx voyons ! Le 4ème personnage de l’Etat – juste après le roi (Baudouin), la reine (Fabiola) et Eddy (Merckx) -. Claudine Merckx faisait donc bien de la publicité pour de la graisse à frites.
Imagine-t-on aujourd’hui, la reine Paola dans une pub, qui annoncerait qu’elle lave les caleçons d’Albert avec Dash ? Ou Carla (Bruni) assurant que les assiettes de Nicolas (Sarkozy) sont plus brillantes avec Dreft ? Barbara (Bush) certifiant que George (W) exige que les sols de la Maison Blanche soient nettoyés avec Monsieur Propre ? Angelina (Jolie) prétendre que son Brad (Pitt) ne se torche qu’avec du papier WC Lotus ?
C’est que nos héros étaient aussi nos familiers. Qui ne vivaient pas vraiment différemment de nous. Mangeaient les mêmes choses. Roulaient dans (presque) les mêmes voitures. Avaient les mêmes activités. Qu’il n’était pas impensable de les croiser dans la rue, ou chez le boucher. Que de suggérer même qu’ils pourraient avoir besoin de gardes du corps vous aurait mené tout droit à l’asile. Ils n’avaient pas pour seule gloire de nous exhiber dans les journaux à scandales, leurs amours aussi tumultueuses que passagères et leur luxe insensé !
Mais maintenant, j’ai des doutes : ne me dites pas que vous ne connaissez pas Eddy Merckx !
vendredi 13 juin 2008
Bonnes soeurs
La sœur Marie-Bernard nous donnait cours de religion. Avec elle vivaient une ou deux autres bonnes-sœur.
Les bonnes sœurs. On disait aussi qu’on allait chez les Chères sœurs. Qui avaient parfois un (ou deux) prénom(s) – mais de nom, jamais -. Qui n’était pas le leur évidemment, mais celui dont on les avait affublées quand elles avaient quitté la vie civile.
Quand j’étais vraiment gamin, certaines portaient encore la cornette. A croire qu’elles voulaient s’envoler. Ou paraître moins sévères qu’elles ne l’étaient.
Sœur Sourire chantait Dominique (nique nique !) et cartonnait au hit-parade.
Au collège, il parait qu’elles étaient encore présentes. Qu’elles habitaient de l’autre côté de la cour. Qu’elles travaillaient un peu dans la cuisine. Si discrètes, si invisibles, qu’on aurait pu les prendre pour des elfes de maison.
Elles semblent avoir disparu. S’être dissoutes dans l’air du temps en même temps qu’elles quittaient leur habit.
Les bonnes sœurs. On disait aussi qu’on allait chez les Chères sœurs. Qui avaient parfois un (ou deux) prénom(s) – mais de nom, jamais -. Qui n’était pas le leur évidemment, mais celui dont on les avait affublées quand elles avaient quitté la vie civile.
Quand j’étais vraiment gamin, certaines portaient encore la cornette. A croire qu’elles voulaient s’envoler. Ou paraître moins sévères qu’elles ne l’étaient.
Sœur Sourire chantait Dominique (nique nique !) et cartonnait au hit-parade.
Au collège, il parait qu’elles étaient encore présentes. Qu’elles habitaient de l’autre côté de la cour. Qu’elles travaillaient un peu dans la cuisine. Si discrètes, si invisibles, qu’on aurait pu les prendre pour des elfes de maison.
Elles semblent avoir disparu. S’être dissoutes dans l’air du temps en même temps qu’elles quittaient leur habit.
jeudi 12 juin 2008
Aufray (Hugues)
Inoxydable ! Hugues Aufray est inoxydable !
Son premier disque date de 59. Avant ça, c’est sûr, je ne l’aurais pas écouté !
Connu ? On peut difficilement l’être plus. Même mes parents – qui n’en avaient pas vingt - avaient un disque de lui : Stewball sur une face, Céline sur l’autre. A moins que ce ne soit l’inverse puisqu’il y avait bien une face A et une face B sur les vinyls.
Mais - comme d’autres chez les scouts - c’est au patro que j’en ai entendu d’autres. Santiano par exemple, et Stewball à nouveau. Et à s’en casser les oreilles. A en avoir marre… et pourtant, on continuait. Des paroles, une histoire, qui coulent de source. Une mélodie facile à caser dans l’oreille et dans la bouche. Ce sont plutôt de ces chansons que l’on chante que de celles qu’on écoute ! A la veillée, dans le bus ou le car, en marchant.
Et la voix d’Hugues Aufray a quelque chose d’étrange. Qui pourrait la rendre rebutante. A moins qu’elle ne soit seulement de son époque. Ce fond de vibrato. Ce son un peu nasillard. Dans son genre, elle me fait penser à celle de Christophe (Aline … pour qu’elle revienne !). Pas identique, pas du tout, mais décalées toutes les deux. Hors format.
Son premier disque date de 59. Avant ça, c’est sûr, je ne l’aurais pas écouté !
Connu ? On peut difficilement l’être plus. Même mes parents – qui n’en avaient pas vingt - avaient un disque de lui : Stewball sur une face, Céline sur l’autre. A moins que ce ne soit l’inverse puisqu’il y avait bien une face A et une face B sur les vinyls.
Mais - comme d’autres chez les scouts - c’est au patro que j’en ai entendu d’autres. Santiano par exemple, et Stewball à nouveau. Et à s’en casser les oreilles. A en avoir marre… et pourtant, on continuait. Des paroles, une histoire, qui coulent de source. Une mélodie facile à caser dans l’oreille et dans la bouche. Ce sont plutôt de ces chansons que l’on chante que de celles qu’on écoute ! A la veillée, dans le bus ou le car, en marchant.
Et la voix d’Hugues Aufray a quelque chose d’étrange. Qui pourrait la rendre rebutante. A moins qu’elle ne soit seulement de son époque. Ce fond de vibrato. Ce son un peu nasillard. Dans son genre, elle me fait penser à celle de Christophe (Aline … pour qu’elle revienne !). Pas identique, pas du tout, mais décalées toutes les deux. Hors format.
mercredi 11 juin 2008
Zip
Cha-cha, Milky way, Mars, Bounty. On connaissait tout ça. Je préférais les Zip !
Est-ce qu’ils ont changé la formule ? En tout cas, les Zip d’aujourd’hui ne sont plus ce qu’ils étaient. Ou alors, c’est juste dans ma tête que ça se passe. Plus durs. Plus caramélisés. Plus ceci. Plus cela. Franchement, l’expérience n’est plus la même.
Serait-ce la faute au réchauffement climatique ? Qu’il faisait alors plus froid qu’aujourd’hui ? Un bon conseil, si vous avez la nostalgie des Zip d’alors, mettez le votre au surgélateur. Il y a peu de chance de vos enfants l’y trouvent (ils font rarement la cuisine), et, si vos dents résistent à l’épreuve du matériau surgelé, vous y retrouverez un peu plaisir d’antan !
Est-ce qu’ils ont changé la formule ? En tout cas, les Zip d’aujourd’hui ne sont plus ce qu’ils étaient. Ou alors, c’est juste dans ma tête que ça se passe. Plus durs. Plus caramélisés. Plus ceci. Plus cela. Franchement, l’expérience n’est plus la même.
Serait-ce la faute au réchauffement climatique ? Qu’il faisait alors plus froid qu’aujourd’hui ? Un bon conseil, si vous avez la nostalgie des Zip d’alors, mettez le votre au surgélateur. Il y a peu de chance de vos enfants l’y trouvent (ils font rarement la cuisine), et, si vos dents résistent à l’épreuve du matériau surgelé, vous y retrouverez un peu plaisir d’antan !
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mardi 10 juin 2008
Yeti
Tchang, Tintin, et le yeti. Le Tibet, c’était juste ça !
Je ne sais pas pour vous, mais pour moi, Tintin, c’était d’abord Tintin au Tibet. Lu et relu de dizaines de fois. Comme gravé dans ma mémoire visuelle.
La couverture d’abord. Si blanche. Si construite. S’il doit y avoir quelque part de la ligne claire, c’est bien dans cette couverture là.
Puis l’amitié. Dans tous les autres Tintin, le héros a bien des partenaires, des gens qu’il sauve, des gens qu’il aide ou qu’il aide. Des alliés en somme. Mais c’est seulement dans Tintin au Tibet qu’il est véritablement question d’amitié, voire d’amour.
Enfin, le Yeti. Evitez donc de voyager avec moi dans l’Himalaya. Le jour où on le rencontrerait, j’aurais bien du mal à en avoir peur, tant il a fait partie de mes rêveries d’enfant !
Je ne sais pas pour vous, mais pour moi, Tintin, c’était d’abord Tintin au Tibet. Lu et relu de dizaines de fois. Comme gravé dans ma mémoire visuelle.
La couverture d’abord. Si blanche. Si construite. S’il doit y avoir quelque part de la ligne claire, c’est bien dans cette couverture là.
Puis l’amitié. Dans tous les autres Tintin, le héros a bien des partenaires, des gens qu’il sauve, des gens qu’il aide ou qu’il aide. Des alliés en somme. Mais c’est seulement dans Tintin au Tibet qu’il est véritablement question d’amitié, voire d’amour.
Enfin, le Yeti. Evitez donc de voyager avec moi dans l’Himalaya. Le jour où on le rencontrerait, j’aurais bien du mal à en avoir peur, tant il a fait partie de mes rêveries d’enfant !
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lundi 9 juin 2008
dimanche 8 juin 2008
Théâtre wallon
Il n’y a même plus de théâtre à la télévision. Ne parlons pas alors du théâtre wallon.
A la télévision, jadis, le théâtre faisait recette.
Et, le samedi après-midi, si je me souviens bien, il y avait même du théâtre wallon. Théâtre dialectal que ça s'appelait. Qu’on ne regardait pas toujours. Seul le wallon liégeois nous intéressait. C’était le seul que nous comprenions.
Drôle ? Pas vraiment. Intéressant ? Pas non plus. Alors ? Pourquoi le regardait-on ?
Savoureux peut-être. Odorant. Goûteux. Ce devait être ça.
Alors que nous parlions français à la maison et à l’école. Que nous pensions ne pas avoir d’accent. Que la chasse aux belgicismes était déjà ouverte. Le wallon du carnaval de Malmédy, celui du théâtre wallon à la télévision, étaient comme des vacances. Mais de ces vacances de jadis, quand, au lieu de s’en aller au loin, vers l’exotisme, il s’agissait, chez une grand-mère ou une tante de la campagne, de revenir à soi, tout simplement.
A la télévision, jadis, le théâtre faisait recette.
Et, le samedi après-midi, si je me souviens bien, il y avait même du théâtre wallon. Théâtre dialectal que ça s'appelait. Qu’on ne regardait pas toujours. Seul le wallon liégeois nous intéressait. C’était le seul que nous comprenions.
Drôle ? Pas vraiment. Intéressant ? Pas non plus. Alors ? Pourquoi le regardait-on ?
Savoureux peut-être. Odorant. Goûteux. Ce devait être ça.
Alors que nous parlions français à la maison et à l’école. Que nous pensions ne pas avoir d’accent. Que la chasse aux belgicismes était déjà ouverte. Le wallon du carnaval de Malmédy, celui du théâtre wallon à la télévision, étaient comme des vacances. Mais de ces vacances de jadis, quand, au lieu de s’en aller au loin, vers l’exotisme, il s’agissait, chez une grand-mère ou une tante de la campagne, de revenir à soi, tout simplement.
samedi 7 juin 2008
Variole
En 1962, la crainte d’une épidémie de variole amena les autorités à interdire le carnaval de Malmédy !
Vers le 29 avril de cette année là – j’avais trois ans et demi – je me souviens de l’hôpital, où l’un de mes frères venait de naître. Du centre de la ville, qui n’avait rien de bien particulier. Mais surtout du journal gratuit qui, au lieu du programme des festivités, affichait le dessin d’une haguette en pleurs. Le masque traditionnel du carnaval de Malmédy était effondré par l’interdiction. La vie des Malmédiens s’arrêtait. Vide de sens !
Ils auraient, sans aucun doute, préféré le carnaval, au risque de la variole ! Quand il s’agissait du cwarmè, les Malmédiens avaient de l’héroïsme.
Vers le 29 avril de cette année là – j’avais trois ans et demi – je me souviens de l’hôpital, où l’un de mes frères venait de naître. Du centre de la ville, qui n’avait rien de bien particulier. Mais surtout du journal gratuit qui, au lieu du programme des festivités, affichait le dessin d’une haguette en pleurs. Le masque traditionnel du carnaval de Malmédy était effondré par l’interdiction. La vie des Malmédiens s’arrêtait. Vide de sens !
Ils auraient, sans aucun doute, préféré le carnaval, au risque de la variole ! Quand il s’agissait du cwarmè, les Malmédiens avaient de l’héroïsme.
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V
vendredi 6 juin 2008
Usine
Le matin, deux fois le midi, et le soir aussi, il y avait grand monde sur le chemin des usines.
Deux papeteries, celle du Pont de Warche, en bas de la ville, et Steinbach, en haut. Une tannerie. C’était tous les jours, à heures fixes, un grand déménagement de population qui allait au travail. Des dizaines et des centaines de vélos. Des piétons aussi. Qui se rendaient à l’usine ou qui en revenaient.
Sans grand bruit. Comme si elles étaient de gigantesques électro-aimants. Attirant ou repoussant telle ou telle particule. Inlassablement. Eternellement croyait-on alors !
Deux papeteries, celle du Pont de Warche, en bas de la ville, et Steinbach, en haut. Une tannerie. C’était tous les jours, à heures fixes, un grand déménagement de population qui allait au travail. Des dizaines et des centaines de vélos. Des piétons aussi. Qui se rendaient à l’usine ou qui en revenaient.
Sans grand bruit. Comme si elles étaient de gigantesques électro-aimants. Attirant ou repoussant telle ou telle particule. Inlassablement. Eternellement croyait-on alors !
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jeudi 5 juin 2008
Tchiniss
Des tchiniss, c’est des riquettes quoi !
Les Bruxellois (entendez tous ceux qui habitent Bruxelles, le Brabant Wallon, ou y ont jamais habité) disent du brol. Nous on disait tchiniss, riquettes.
Rien de bien glorieux sans doute : range tes tchiniss, je vais jeter toutes ces riquettes,… l’expression était toujours méprisante. Pourtant, que de trésors cachés : un gros coquillage qu’on a frotté sur le pavé pour y faire un trou et s’en servir comme nœud de foulard en colonie, un compas dont on a perdu la pointe, une bouteille d’encre de chine à moitié – ou tout à fait - séchée, une dent de lait, trois pyrites grosses comme des petits pois, une médaille de Saint Roch (« préservez nous du choléra »), un canif plus ou moins suisse, un porte clef - dont le Schtroumpf a disparu depuis longtemps - portant une clef de cadenas – perdu lui aussi -, un carnet presque plein des brigades M, un œil d’ours en peluche, deux pinces à linge en bois, un lance-pierre, deux pièces à trou, un timbre indonésien, une grosse bille – qui fut très jolie – cassée, trois images de chocolat Jacques, un emballage (perdant) de bazooka,… et un raton laveur !
Les Bruxellois (entendez tous ceux qui habitent Bruxelles, le Brabant Wallon, ou y ont jamais habité) disent du brol. Nous on disait tchiniss, riquettes.
Rien de bien glorieux sans doute : range tes tchiniss, je vais jeter toutes ces riquettes,… l’expression était toujours méprisante. Pourtant, que de trésors cachés : un gros coquillage qu’on a frotté sur le pavé pour y faire un trou et s’en servir comme nœud de foulard en colonie, un compas dont on a perdu la pointe, une bouteille d’encre de chine à moitié – ou tout à fait - séchée, une dent de lait, trois pyrites grosses comme des petits pois, une médaille de Saint Roch (« préservez nous du choléra »), un canif plus ou moins suisse, un porte clef - dont le Schtroumpf a disparu depuis longtemps - portant une clef de cadenas – perdu lui aussi -, un carnet presque plein des brigades M, un œil d’ours en peluche, deux pinces à linge en bois, un lance-pierre, deux pièces à trou, un timbre indonésien, une grosse bille – qui fut très jolie – cassée, trois images de chocolat Jacques, un emballage (perdant) de bazooka,… et un raton laveur !
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mercredi 4 juin 2008
Sirop de souris
Si tu fais encore pipi au lit, on te donnera du sirop de souris !
Je le confesse, longtemps j’ai fait pipi au lit ! Ils n’étaient pas méchants les voisins, que du contraire, qu’aurions-nous fait sans leur acceuil bienveillant lorsque nos parents étaient débordés, mais leurs méthodes éducatives laissaient à désirer !
Contre la toux, le sirop de limaces. Que j’imaginais sorti de ses verres de bière que les jardiniers alors enterraient dans les jardins. Je n’aimais pas la bière, et je savais que je n’aimerais pas plus la limace. Alors, les deux, pensez donc !
Contre le pipi au lit, le sirop de souris. Que je n’ai jamais pu me représenter d’ailleurs. Mais qui ne me tentait pas plus que celui à la limace. Sachant d’expérience combien une souris était plus solide qu’une limace. Craignant par-dessus tout qu’il en reste quelque morceau dans la potion au moment d’avoir à l’avaler.
De plus, ça ne marchait pas ! Nous ne toussions pas moins, ni ne pissions moins au lit, d’imaginer la torture. Que du contraire peut-être.
Je le confesse, longtemps j’ai fait pipi au lit ! Ils n’étaient pas méchants les voisins, que du contraire, qu’aurions-nous fait sans leur acceuil bienveillant lorsque nos parents étaient débordés, mais leurs méthodes éducatives laissaient à désirer !
Contre la toux, le sirop de limaces. Que j’imaginais sorti de ses verres de bière que les jardiniers alors enterraient dans les jardins. Je n’aimais pas la bière, et je savais que je n’aimerais pas plus la limace. Alors, les deux, pensez donc !
Contre le pipi au lit, le sirop de souris. Que je n’ai jamais pu me représenter d’ailleurs. Mais qui ne me tentait pas plus que celui à la limace. Sachant d’expérience combien une souris était plus solide qu’une limace. Craignant par-dessus tout qu’il en reste quelque morceau dans la potion au moment d’avoir à l’avaler.
De plus, ça ne marchait pas ! Nous ne toussions pas moins, ni ne pissions moins au lit, d’imaginer la torture. Que du contraire peut-être.
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mardi 3 juin 2008
Remise des prix
La remise des prix, une vraie torture pour l’élève moyen !
Suant de suffisance, le bon élève s’avance. La tête haute et le torse bombé. En plus des trois livres qui nous revenaient à chacun – l’école communale avait alors à cœur de promouvoir la lecture dans les familles – il en ramassait plein d’autres, et des gros, lui faisant un bagage presque aussi gros que notre cartable de tous les jours. Puis venait le défilé des anonymes, des moyens mêlés aux médiocres. Pas de pitié pour aucun. Ne pas être le premier, le second, à la limite ne troisième, était un crime ; devait être sanctionné. Le médiocre quatrième et le bon dernier subissaient le même sort : 3 livres et un regard distrait d’un directeur déjà fatigué d’une distribution qui s’éternise. Même le dernier pouvait se sentir plus heureux. Passant le dernier, au moins, il était un peu remarqué. Tout le monde savait qui il était.
Plus terrible encore quand cette fameuse remise des prix se faisait dans la grande salle de l’école, et qu’au lieu de la modeste et familière estrade, c’est la scène qu’il fallait escalader pour exhiber toute sa médiocrité.
La consolation venait au retour à la maison lorsque ma mère ramassait tous les livres de la famille. Elle en écartait parfois – rarement – l’un ou l’autre, qui avait l’heur de nous plaire, et qui tranchait par rapport à la confondante bêtise et manque d’imagination de l’ensemble (A nous six, nous avons sûrement ramené au moins 4 ou 5 « Capitaine courageux » et au moins autant de l’un ou l’autre de ceux que nos maîtres jugeaient indispensables à toute bonne bibliothèque). Mais l’essentiel disparaissait le jour même, et reprenait le chemin de la librairie qui nous les échangeait contre des ouvrages un peu plus conformes à nos vœux ! La vraie remise des prix, c’est bien ma mère qui la faisait.
Suant de suffisance, le bon élève s’avance. La tête haute et le torse bombé. En plus des trois livres qui nous revenaient à chacun – l’école communale avait alors à cœur de promouvoir la lecture dans les familles – il en ramassait plein d’autres, et des gros, lui faisant un bagage presque aussi gros que notre cartable de tous les jours. Puis venait le défilé des anonymes, des moyens mêlés aux médiocres. Pas de pitié pour aucun. Ne pas être le premier, le second, à la limite ne troisième, était un crime ; devait être sanctionné. Le médiocre quatrième et le bon dernier subissaient le même sort : 3 livres et un regard distrait d’un directeur déjà fatigué d’une distribution qui s’éternise. Même le dernier pouvait se sentir plus heureux. Passant le dernier, au moins, il était un peu remarqué. Tout le monde savait qui il était.
Plus terrible encore quand cette fameuse remise des prix se faisait dans la grande salle de l’école, et qu’au lieu de la modeste et familière estrade, c’est la scène qu’il fallait escalader pour exhiber toute sa médiocrité.
La consolation venait au retour à la maison lorsque ma mère ramassait tous les livres de la famille. Elle en écartait parfois – rarement – l’un ou l’autre, qui avait l’heur de nous plaire, et qui tranchait par rapport à la confondante bêtise et manque d’imagination de l’ensemble (A nous six, nous avons sûrement ramené au moins 4 ou 5 « Capitaine courageux » et au moins autant de l’un ou l’autre de ceux que nos maîtres jugeaient indispensables à toute bonne bibliothèque). Mais l’essentiel disparaissait le jour même, et reprenait le chemin de la librairie qui nous les échangeait contre des ouvrages un peu plus conformes à nos vœux ! La vraie remise des prix, c’est bien ma mère qui la faisait.
lundi 2 juin 2008
Quetsche
On disait : je voudrais une bière, une poire, une quetsche, un genièvre… On ne parlait pas de marque ! ou si rarement. On changeait de café, on changeait de marque !
Et pourtant, les gens préféraient bien la Jupiler ou la Stella. Et le genièvre de Géromont ou celui des Hollandais.
Et, quand il n’y avait pas de quetsche… et bien on buvait une poire !
Et pourtant, les gens préféraient bien la Jupiler ou la Stella. Et le genièvre de Géromont ou celui des Hollandais.
Et, quand il n’y avait pas de quetsche… et bien on buvait une poire !
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dimanche 1 juin 2008
Papier carbone
Une feuille de papier, un papier carbone, une autre feuille de papier, un autre papier carbone, la dernière feuille de papier, le tout dans la machine à écrire. Avant la photocopie, magie du carbone, qui permettait de multiplier les messages.
Le papier carbone ? Je parie que mes gosses n’en ont jamais vu. Ca fait d’ailleurs au moins vingt ans que je n’en ai plus vu moi-même. Le matériau, quelque chose qui ressemblait à du plastique, très fin et résistant à la fois. Noir. La frappe de la machine à écrire se transmettait à travers le papier, et le carbone laissait sa trace d’encre sur la page suivante. Simplissime.
J’en ai utilisé des tonnes, et d’autres aussi. S’imagine-t-on l’énergie qu’il aurait fallu autrement pour écrire à tous ses copains, à toute la famille, pour donner chaque fois les mêmes nouvelles quand on vivait au loin ? Il n’était pas encore question de mémoire informatique, et la photocopie, quand elle est apparue était aussi instable que chère.
Tiens, et à force d’y penser, il me semble aussi que le papier carbone avait une odeur particulière. Quelque chose de très subtil, que je n’arrive plus à retrouver vraiment. Je l’ai là, sur le bout du nez, comme d’autres ont un mot sur le bout de la langue.
Le papier carbone ? Je parie que mes gosses n’en ont jamais vu. Ca fait d’ailleurs au moins vingt ans que je n’en ai plus vu moi-même. Le matériau, quelque chose qui ressemblait à du plastique, très fin et résistant à la fois. Noir. La frappe de la machine à écrire se transmettait à travers le papier, et le carbone laissait sa trace d’encre sur la page suivante. Simplissime.
J’en ai utilisé des tonnes, et d’autres aussi. S’imagine-t-on l’énergie qu’il aurait fallu autrement pour écrire à tous ses copains, à toute la famille, pour donner chaque fois les mêmes nouvelles quand on vivait au loin ? Il n’était pas encore question de mémoire informatique, et la photocopie, quand elle est apparue était aussi instable que chère.
Tiens, et à force d’y penser, il me semble aussi que le papier carbone avait une odeur particulière. Quelque chose de très subtil, que je n’arrive plus à retrouver vraiment. Je l’ai là, sur le bout du nez, comme d’autres ont un mot sur le bout de la langue.
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