mercredi 2 juillet 2008

Unigro

Le catalogue Unigro était indispensable ! C’était le seul qui permettait de faire de bonnes flèches de sarbacane.

Arrachez une feuille du catalogue. Roulez-la autour de votre index de la main droite, tout en maintenant de la main gauche son autre extrémité pour en faire une pointe. Ni trop fine – elle ne profitera pas de tout votre souffle – ni trop grosse – vous serez obligé de la couper – léchez le bord de la feuille pour sceller votre cône de papier.
Enfilez votre flèche dans les précédentes et recommencez.
Avec une vingtaine de flèches, vous êtes prêt pour le combat. Il sera toujours possible de ramasser celles des ennemis pour les leur renvoyer.
Bien rangées dans votre carquois. La sarbacane – un tube pour câble électriques coupé à la bonne longueur - en main, vous vous lancez sur le sentier de la guerre.

mardi 1 juillet 2008

Tanneries

A leur retour, les touristes semblaient n’avoir retenu que la puanteur des tanneries marocaines. La Warche n’était pas si loin que le Maroc !

A Malmédy, il y avait d’abord les anciennes tanneries. Marquant l’entrée de la ville, comme une muraille historique, elles exhibaient leurs colombages et leur ruine. Spectaculaires. Historiques. Je comprends difficilement aujourd’hui qu’on ait autorisé leur disparition. C’est une tout autre ville qu’on donnerait aujourd’hui à voir. Reste donc le souvenir seulement.
Les tanneries en activité ensuite. Laides comme des usines de ce temps là. Sales aussi. On n’en voyait pas grand-chose. Quelques charriots de peau parfois. Un camion qui entre ou qui sort. Des déchets surtout. Entre vert et bleu. Dégageant une odeur obsédante de bassin de décantation. Tout autour de la tannerie la même couleur… sur les quelques fleurs rachitiques qui survivaient… sur les ponts… sur les murs… Dans la rivière et sur ses rives. La Warche prenait des apparences de cours d’eau d’après cataclysme : au lieu de fleurs, des rhubarbes sauvages ; au lieu de poissons, quelques lambeaux de cuir ; et pour tous oiseaux des corneilles à la chasse aux rats !
Aujourd’hui enfin, il n’en reste plus rien. L’odeur est partie. La couleur avec elle. L’emploi, l’espoir de quelque richesse aussi. Bientôt, tout le monde aura oublié !

lundi 30 juin 2008

Scierie

On disait juste « la scierie ». Je vais à la scierie. Ou parfois, à la scierie Closson.

On montait, par la laiterie. Puis à gauche, vers Floriheid et la ville. Pas tout droit, on serait alors arrivé aux trois bosses, puis à la grosse bosse. Et ça, c’était pour l’hiver seulement, pour le traineau. Donc, à gauche ! Il y avait encore un autre bâtiment, avant. Mais ma mémoire me joue des tours. Pas moyen de lui redonner forme. Une usine de machines à laver ? Je rêve peut-être. De machines à coudre ? Il me semble y voir encore « Singer ». Inactive en tout cas. Depuis toujours.
Juste après le coude, séparée de la voie ferrée par la route, c’était donc la scierie. De longs batiments plats à droite et au fond. Et puis, juste devant, le paradis des enfants. Une montagne de déchets !
Des cintres de bois – le modèle tout simple, l’équivalent des stupides cintres en plastique de nos supermarchés – par centaines. Deux cintres cloués ensemble faisaient un cimeterre. Un cintre tout seul pouvait constituer la garde d’une épée.
Des moulures rondes – clouées au bas du cintre, elles en constituaient la partie droite – dont nous faisions des fleurets ou des flèches pour nos arcs.
Des dosses – la dernière planche de sciage, présentant l’arrondi du tronc – et autres déchets plats, nous tenaient lieu de boucliers.
Ainsi équipés, nous étions prêts pour nous lancer dans la fabrication de nos armes… et le lendemain, c’était la guerre enfin. Entre cow-boys et indiens… mousquetaires… chevaliers et templiers… Entre templiers et cow-boys s'il le fallait. Au mépris de l'histoire et pour notre plus grand plaisir.
Pour le prix de trois clous et deux bouts de ficelle, nous avions fabriqué nos jouets. Recyclables et biodégradables !

dimanche 29 juin 2008

Richard

Richard, c’était Richard ! Le fou. Promenant sa longue silhouette et sa tête de rouquin dans les rues de la ville. Faisant rire tout le monde. Et moqué par tous.

Pitoyable. Ridicule et inhumaine. Même bien habillé et nourri comme devait l’être Richard, la vie d’un malade mental dans une petite ville pouvait être terrible !
Pour moi, gamin, il était là depuis toujours. Que ce soit en haut ou en bas de la ville, je le croisais souvent. Et sa démarche, caractéristique, le faisait un peu ressembler au Monsieur Hulot de Jacques Tati. Comme s’il tombait en permanence vers l’avant. Et ne marchait que pour ne pas chuter.
Portant un long manteau. Je vois un loden. Mais ce ne devait pas être le cas. Trop beau. Trop chaud. Mais pourquoi pas ? Laissons-lui donc ce loden que je lui imagine.
Au carnaval, il couronnait sa tête d’un chapeau ridicule. Tyrolien peut-être. Jouait d’une flute ou d’une trompette en plastique, ou bien du mirliton, dans l’une ou l’autre fanfare. Le public riait. Le plaisantait.
Richard était sans âge. La moitié du cerveau d’un enfant de dix ans dans un corps presque vieux. Mais il marchait, marchait.
Puis je l’ai vu quelques fois en colère. Pris d’une rage folle. Marcher plus vite encore. Tenté de frapper le premier enfant à sa portée.
J’ai entendu dire que certains – et certaines – s’étaient mis à le plaisanter de plus en plus grassement, de plus en plus crûment. Le commissaire de police était même passé dans les classes pour expliquer aux enfants qu’ils ne devaient pas suivre l’exemple des adultes.
Je ne sais pas ce qu’il est devenu. Si sa fin aura été meilleure ou pire que le reste de sa vie. Mais, je ne peux m’empêcher quand j’entends Reggiani changer « Priez pour le pauvre Gaspard » - sur un texte de Verlaine – de penser à Richard.

samedi 28 juin 2008

Quirin

Quirin ? Qui voudrait s’appeler Quirin ?

Et pourtant, il y a bien un Saint Quirin. Mais bon, il y a aussi les Saint Innocents, et la Saint Glinglin… Alors ?
Pour ma part, j’ai souvent – faudrait-il dire toujours – entendu parler d’un certain « Tchâ Quèré Lemère » (Jean Quirin Lemaire). Au point qu’il est devenu une sorte d’ancêtre mythique. Comme si l’on me disait descendant de Rabelais, de Charlemagne… mais eux sont trop connus, figés et figurés dans l’histoire. Plutôt descendant alors de Tchantchet, de Tijl Uylenspiegel ou du Manneken-Pis…
De ces ancêtres qu’on ne tente pas d’inscrire dans le temps – né en telle année, mort en telle autre – ni dans l’espace – habitait à tel endroit -, mais qu’on laisse vagabonder dans l’imaginaire, à toutes les époques (c’est juste un Lemaire), entre ville et campagne (un nom pareil sent la glaise, la tourbe, les bœufs que l’on mène sur la fagne) et nationalités (Belge, Allemand ?).
De ces ancêtres qui, rien que pour celà, mériteraient de transmettre leur prénom aux générations futures !

vendredi 27 juin 2008

Pousseur (Henry)

Henry Pousseur, né à Malmédy, a l’âge de ma mère.

Visitez Malmédy. Rencontrez ses habitants. Et vous imaginerez difficilement comment un Henry Pousseur peut en être issu.
Faites en de même à Charleville, et essayez, dans la rue, comme ça, de trouver de futurs Rimbaud. Mais au moins, à Charleville, j’imagine que la plupart aura lu, ou entendu, un poème au moins d’Arthur.
Oserais-je imaginer qu’à Malmédy, un jour, tout le monde aura entendu, à défaut d'écouter, toute une œuvre de Henry Pousseur ? Ou serait-il encore trop tôt ? Une bonne gloire locale est-elle nécessairement une gloire morte ? Ou bien la malédiction serait-elle éternelle qui fait que nul n’est prophète en son pays ?
Entre 1961 (il était un peu tôt il est vrai, à trois ans, pour nous abreuver de musique sérielle ou dodécaphonique... mais pourquoi pas ?) et 1972 - mes années d'école là bas -, je trouve bizarre qu’aucun de mes instituteurs, puis de mes professeurs – de musique par exemple ! – ait jamais eu l’idée de nous entretenir d’un fils de la cité qui faisait parler de lui ailleurs.
Les seules fois où j’en ai entendu parler, c’était par plaisanterie. Chacun imaginant une symphonie pour sachets de pain ou un concerto pour nouvelles chaussures et batterie de cuisine.
Résultat. A près de cinquante ans, je n’en sais pas plus sur mon concitoyen !

jeudi 26 juin 2008

Oncle Paul

Relire l’Oncle Paul, c’est comme entrer dans une machine à remonter le temps !

Le papier, un peu rèche. Pas le papier glacé d’aujourd’hui. L’encre qui sentait. Et puis ces histoires, comme racontées par un prof, par un oncle – évidemment – ou comme ces émissions historiques en radio et en télévision. Vite lu. Et on en retenait pas mal…
Mais, si vous voulez vraiment vous replonger dans l’ambiance, je vous conseille Jerry Spring et Buck Dany. C’est radical ! Vous rajeunirez de trente ou quarante années au moins !