Koniec !
Ainsi tombait la fin de Lolek et Bolek, un dessin animé de mon enfance. Deux garnements – en noir et blanc évidemment puisque notre télévision n’était pas encore en couleur – s’agitaient et faisaient leurs bêtises à l’écran. C’était presque du muet : juste des rires et quelques bruitages. Un dessin animé international. Pas besoin même de traduire le texte : la preuve, nous avons bien découvert par nous-mêmes que Koniec signifiait fin !
A votre tour de le découvrir.
Koniec ! donc …
mardi 14 octobre 2008
lundi 13 octobre 2008
Fonds de tiroirs
Quoi, déjà l’avant-veille ? Et moi qui n’ai pas encore vidé tous mes tiroirs !
J’aurais encore voulu vous entretenir de tas de choses, et presque chaque jour qui passe réveille l’un ou l’autre souvenir. En la parcourant, ma mémoire m’apparaît comme ces veilles maisons, habitées par des générations successives qui y ont abandonné surtout ce dont personne ne se préoccupe, les choses qui ne feront jamais l’objet d’une vente ou d’un héritage, tous ces objets et ces instants ridicules qui font pourtant l’essentiel de notre vie.
Un vieux bâton de réglisse, déjà tout mâchouillé. Quelques emballages de bazookas. Un calendrier du petit farceur. Un blazer pour la communion du gamin. Un bocal à bonbons au couvercle transparent. Des bottes de caoutchouc. Un cahier vert avec les tables de multiplications sur la quatrième de couverture. Quelques caleçons et singlets. Une carabine à plombs. Un émetteur-récepteur de CB.
Les CCC. Une ceinture de sécurité avant qu’elles ne soient à enrouleur. La CGER. Une charge de cavalerie du côté de la place Rouppe. L’odeur du chocolat à la gare du midi et celle de chou à l’avenue Wielemans. Une cireuse électrique pour les parquets. Une friture qui s’appelait « le colonial ». Un Commodore 64. Quelques copocléphiles (pas de panique, ce ne sont que des collectionneurs de porte-clefs !). La cour qui était synonyme de toilette.
Une cuchnee. Ma dernière cutiréaction. Un ou deux doryphores dont j'admire les couleurs. Un double carburateur en tête. Une rivière pleine d’écrevisses. Une dose de Fénergan pour faire dormir les enfants. Les filigranes du papier Steinbach. Un film 110. La RTB qui quitte Flagey pour aller à Reyers. Le flash-cube.
Le franc belge. Franco. Jean Claude Darnal. Les jeux sans frontières. Une machine à laver en cuivre. Dans chaque ville au moins une maison de la sorcière. Le maître et la maîtresse qu’étaient alors les instituteurs. La malle Ostende Douvres. Une pile de Marabout flash sur les sujets les plus bizarres (j’écris mon blog ?). La messe de minuit à minuit.
La mire annoncée par la brabançonne et rythmée par une ritournelle de Grétry. Quelques mouchoirs en tissus oubliés. Un pain blanc. Le passe vite. Une permanente qui ressemble à une choucroute. Quelques pommes de terre pètées. Le petit séminaire. Un Pif Poche tout déchiré. Des draps de pilou. Un jeu de pinces à linge en bois.
Quatre pneus à clous. Notre première poêleTefal. Le bureau de pointage et sa file de chômeurs. Un pompiste pour servir l’essence. Un paquet de Printen pour la Saint Nicolas ou la Noël. Robert Cogoy. De la rouille à n’en plus finir. L’émission les routiers sont sympas écoutée sous les couvertures. Le magazine Samedi Jeunesse des enfants sages. Mon père qui simonise la voiture.
Des cartes à jouer dans les rayons du vélo. La voisine qui trait ses vaches à la main. Les Trois Cloups. Un ou deux trotskistes égarés. Un cochon égorgé dans la cour de l’école. Une bouteille pour piéger des vairons. Les piles Varta. Et une bonne dose de vitamines pour faire passer le tout.
Mais, le tiroir ainsi vidé, n’oubliez surtout pas de prêter attention au papier qui en couvre le fond. Il peut révéler des merveilles. Ce sera un bout de papier peint peut-être : d’un motif qu’on ne fait plus, enlaçant des fleurs et des oiseaux dans une joyeuse sarabande. Ou alors, un journal, soigneusement plié, il y a cinquante ans au moins, et qui - ignorant le temps passé - répètera fidèlement les nouvelles du jour d’alors. A moins que l’on ait caché quelque chose dessous ?
Allez-donc y voir vous-même. Dans vos propres tiroirs aussi. Pour ma part, j’en ai presque fini avec mes rangements.
J’aurais encore voulu vous entretenir de tas de choses, et presque chaque jour qui passe réveille l’un ou l’autre souvenir. En la parcourant, ma mémoire m’apparaît comme ces veilles maisons, habitées par des générations successives qui y ont abandonné surtout ce dont personne ne se préoccupe, les choses qui ne feront jamais l’objet d’une vente ou d’un héritage, tous ces objets et ces instants ridicules qui font pourtant l’essentiel de notre vie.
Un vieux bâton de réglisse, déjà tout mâchouillé. Quelques emballages de bazookas. Un calendrier du petit farceur. Un blazer pour la communion du gamin. Un bocal à bonbons au couvercle transparent. Des bottes de caoutchouc. Un cahier vert avec les tables de multiplications sur la quatrième de couverture. Quelques caleçons et singlets. Une carabine à plombs. Un émetteur-récepteur de CB.
Les CCC. Une ceinture de sécurité avant qu’elles ne soient à enrouleur. La CGER. Une charge de cavalerie du côté de la place Rouppe. L’odeur du chocolat à la gare du midi et celle de chou à l’avenue Wielemans. Une cireuse électrique pour les parquets. Une friture qui s’appelait « le colonial ». Un Commodore 64. Quelques copocléphiles (pas de panique, ce ne sont que des collectionneurs de porte-clefs !). La cour qui était synonyme de toilette.
Une cuchnee. Ma dernière cutiréaction. Un ou deux doryphores dont j'admire les couleurs. Un double carburateur en tête. Une rivière pleine d’écrevisses. Une dose de Fénergan pour faire dormir les enfants. Les filigranes du papier Steinbach. Un film 110. La RTB qui quitte Flagey pour aller à Reyers. Le flash-cube.
Le franc belge. Franco. Jean Claude Darnal. Les jeux sans frontières. Une machine à laver en cuivre. Dans chaque ville au moins une maison de la sorcière. Le maître et la maîtresse qu’étaient alors les instituteurs. La malle Ostende Douvres. Une pile de Marabout flash sur les sujets les plus bizarres (j’écris mon blog ?). La messe de minuit à minuit.
La mire annoncée par la brabançonne et rythmée par une ritournelle de Grétry. Quelques mouchoirs en tissus oubliés. Un pain blanc. Le passe vite. Une permanente qui ressemble à une choucroute. Quelques pommes de terre pètées. Le petit séminaire. Un Pif Poche tout déchiré. Des draps de pilou. Un jeu de pinces à linge en bois.
Quatre pneus à clous. Notre première poêleTefal. Le bureau de pointage et sa file de chômeurs. Un pompiste pour servir l’essence. Un paquet de Printen pour la Saint Nicolas ou la Noël. Robert Cogoy. De la rouille à n’en plus finir. L’émission les routiers sont sympas écoutée sous les couvertures. Le magazine Samedi Jeunesse des enfants sages. Mon père qui simonise la voiture.
Des cartes à jouer dans les rayons du vélo. La voisine qui trait ses vaches à la main. Les Trois Cloups. Un ou deux trotskistes égarés. Un cochon égorgé dans la cour de l’école. Une bouteille pour piéger des vairons. Les piles Varta. Et une bonne dose de vitamines pour faire passer le tout.
Mais, le tiroir ainsi vidé, n’oubliez surtout pas de prêter attention au papier qui en couvre le fond. Il peut révéler des merveilles. Ce sera un bout de papier peint peut-être : d’un motif qu’on ne fait plus, enlaçant des fleurs et des oiseaux dans une joyeuse sarabande. Ou alors, un journal, soigneusement plié, il y a cinquante ans au moins, et qui - ignorant le temps passé - répètera fidèlement les nouvelles du jour d’alors. A moins que l’on ait caché quelque chose dessous ?
Allez-donc y voir vous-même. Dans vos propres tiroirs aussi. Pour ma part, j’en ai presque fini avec mes rangements.
dimanche 12 octobre 2008
Projecteur de cinema
Vous rappelez-vous le bruit de la machine à écrire ? Et celui du projecteur de cinéma ?
Dans une rue de Prague, cet été, je me suis arrêté soudain. D’une fenêtre ouverte, résonnait dans la rue, la frappe régulière d’une machine à écrire. Quinze ans ? Vingt ans ? Plus encore ? Depuis combien de temps n’avais-je plus entendu ce bruit jadis familier ? Et qui était le (ou la) dactylographiste qui se mettait ainsi à jouer de mes souvenirs ?
Alors, entrainons-nous. De tous les sens, capturons les sensations qui bientôt ne seront plus. Allez de gauche et de droite, sans bien faire le tri : toutes les choses passent ! Concentrez vous tout de même sur les disparitions annoncées, sur les changements qui ont déjà eu lieu.
Le cinéma par exemple : les volutes de fumée des cigarettes qui se déployaient dans le cône de lumière du projecteur ; l’odeur rouge des sièges empoussiérés ou alors trop humides ; la vue de la salle depuis la galerie supérieure. Mais surtout, le bruit caractéristique du projecteur, qui déroule, image après image, son récit. Les interruptions, en cours de film, pour le changement des bobines. La lumière qui s’allume et s’éteint à nouveau – la tâche terminée – dans la cabine du projectionniste. Tous les cinémas du monde ne sont pas encore assez modernes pour nous priver de tous ces incidents !
Dans une rue de Prague, cet été, je me suis arrêté soudain. D’une fenêtre ouverte, résonnait dans la rue, la frappe régulière d’une machine à écrire. Quinze ans ? Vingt ans ? Plus encore ? Depuis combien de temps n’avais-je plus entendu ce bruit jadis familier ? Et qui était le (ou la) dactylographiste qui se mettait ainsi à jouer de mes souvenirs ?
Alors, entrainons-nous. De tous les sens, capturons les sensations qui bientôt ne seront plus. Allez de gauche et de droite, sans bien faire le tri : toutes les choses passent ! Concentrez vous tout de même sur les disparitions annoncées, sur les changements qui ont déjà eu lieu.
Le cinéma par exemple : les volutes de fumée des cigarettes qui se déployaient dans le cône de lumière du projecteur ; l’odeur rouge des sièges empoussiérés ou alors trop humides ; la vue de la salle depuis la galerie supérieure. Mais surtout, le bruit caractéristique du projecteur, qui déroule, image après image, son récit. Les interruptions, en cours de film, pour le changement des bobines. La lumière qui s’allume et s’éteint à nouveau – la tâche terminée – dans la cabine du projectionniste. Tous les cinémas du monde ne sont pas encore assez modernes pour nous priver de tous ces incidents !
samedi 11 octobre 2008
Schleuhs
Comme certains esprits dérangés aujourd’hui détestent l’immigré, certains haïssaient alors en toute démesure le Schleuh !
Schleuh, boche, frisé, fritz, fridolin, doryphore : deux ou trois guerres et tout un vocabulaire hérité des générations précédentes les rendaient poètes à leur manière. Vingt ans plus tard, ils en voulaient encore aux Allemands de l’occupation nazie, mais aussi, par droit d’héritage de la grande guerre de 14 et ce celle de 1870 – oubliant qu’à l’époque ils n’avaient jamais été belges ! -. Après un quart d’heure de récit, il leur venait des héroïsmes qu’ils avaient – très prudemment - oublié d’exercer en temps utile. Mais qu’aurions nous fait à leur place à l’époque ?
Ils n’ont heureusement pas réussi à inoculer leurs allergies et leur fiel ne nous a pas rendus amers. L’Europe est enfin là !
Schleuh, boche, frisé, fritz, fridolin, doryphore : deux ou trois guerres et tout un vocabulaire hérité des générations précédentes les rendaient poètes à leur manière. Vingt ans plus tard, ils en voulaient encore aux Allemands de l’occupation nazie, mais aussi, par droit d’héritage de la grande guerre de 14 et ce celle de 1870 – oubliant qu’à l’époque ils n’avaient jamais été belges ! -. Après un quart d’heure de récit, il leur venait des héroïsmes qu’ils avaient – très prudemment - oublié d’exercer en temps utile. Mais qu’aurions nous fait à leur place à l’époque ?
Ils n’ont heureusement pas réussi à inoculer leurs allergies et leur fiel ne nous a pas rendus amers. L’Europe est enfin là !
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vendredi 10 octobre 2008
Yeye
Yéyé, twist,… je n’ai pas grande culture musicale. Mais de ceux là, j’ai bien entendu quelques morceaux !
Etudiant, j’ai détesté le boum-boum du disco naissant et rien compris au mouvement punk. S’il fallait choisir des choses qui font du bruit, donnez moi plutôt quelques chœur d’opéra !
Quant à la variété des années 60, sans l’aimer, elle me fait voyager dans le temps. Ces voix haut perchées qui articulaient parfaitement des textes par ailleurs stupides. Ces musiques qui – diffusées dans le café de la piscine – ne nous empêchaient pas de discuter encore avec le voisin. Des morceaux entrecoupés de silences – pas comme dans notre monde actuel baigné de musique permanente – ou même, un état habituel de silence marqué parfois par des intermèdes musicaux.
Etudiant, j’ai détesté le boum-boum du disco naissant et rien compris au mouvement punk. S’il fallait choisir des choses qui font du bruit, donnez moi plutôt quelques chœur d’opéra !
Quant à la variété des années 60, sans l’aimer, elle me fait voyager dans le temps. Ces voix haut perchées qui articulaient parfaitement des textes par ailleurs stupides. Ces musiques qui – diffusées dans le café de la piscine – ne nous empêchaient pas de discuter encore avec le voisin. Des morceaux entrecoupés de silences – pas comme dans notre monde actuel baigné de musique permanente – ou même, un état habituel de silence marqué parfois par des intermèdes musicaux.
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jeudi 9 octobre 2008
Quartier
On était d’abord de notre quartier, avant d’être de notre ville !
Ceux des Grands prés y avaient leur école, et leurs amis. Ceux de Floriheid ne fréquentaient pas ceux d’Outrelepont. Et ceux de Montbijou ne jouaient pas au foot avec ceux de la place Albert.
Pas par rejet. Logiquement, tout simplement. Puisqu’il suffisait de sortir dans la rue, et de voir qui s’y trouvait. De commencer à jouer. Et de terminer quand il se faisait tard ou que nos parents nous appelaient.
Plus tard, lorsque nous étions trop grands pour les petites classes du quartier, nous montions à l’école du centre ville. Et nous faisions d’autres amis. Mais pas trop loin tout de même. Dix minutes de vélo maximum. Et ces amitiés ne profitaient pas de l’imprévu des rencontres d’avec les proches. On les réservait aux mercredi ou au samedi après-midi. Et il fallait prendre rendez-vous ou risquer de trouver porte close.
Plus grands encore, il nous arriverait d’ouvrir le cercle plus encore. De nous faire des copains à Bévercé par exemple. Et d’y passer des journées entières. D’explorer avec eux la grotte des nains et les bords de la Warche. Mais là, notre petite moitié libre d’un mercredi ou d’un samedi n’y aurait pas suffi. Nés avec l’été, ces copinages n’y survivaient pas. Nous ne reverrions probablement jamais ceux avec lesquels nous avions passé tant d’heures palpitantes.
Ceux des Grands prés y avaient leur école, et leurs amis. Ceux de Floriheid ne fréquentaient pas ceux d’Outrelepont. Et ceux de Montbijou ne jouaient pas au foot avec ceux de la place Albert.
Pas par rejet. Logiquement, tout simplement. Puisqu’il suffisait de sortir dans la rue, et de voir qui s’y trouvait. De commencer à jouer. Et de terminer quand il se faisait tard ou que nos parents nous appelaient.
Plus tard, lorsque nous étions trop grands pour les petites classes du quartier, nous montions à l’école du centre ville. Et nous faisions d’autres amis. Mais pas trop loin tout de même. Dix minutes de vélo maximum. Et ces amitiés ne profitaient pas de l’imprévu des rencontres d’avec les proches. On les réservait aux mercredi ou au samedi après-midi. Et il fallait prendre rendez-vous ou risquer de trouver porte close.
Plus grands encore, il nous arriverait d’ouvrir le cercle plus encore. De nous faire des copains à Bévercé par exemple. Et d’y passer des journées entières. D’explorer avec eux la grotte des nains et les bords de la Warche. Mais là, notre petite moitié libre d’un mercredi ou d’un samedi n’y aurait pas suffi. Nés avec l’été, ces copinages n’y survivaient pas. Nous ne reverrions probablement jamais ceux avec lesquels nous avions passé tant d’heures palpitantes.
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Q
mercredi 8 octobre 2008
Pronostic Prior
Chaque semaine, oncle Joseph remplissait avec application sa grille Prior.
En fait, Oncle Joseph n’était pas plus notre oncle que tante Catherine n’aurait eu un quelconque lien de parenté avec nous. C’étaient juste de ces parentés de quartier, dans lesquelles les liens d’affection sont parfois plus fort que ceux du sang. De ces délégations d’autorité et d’amour que l’on se croyait forcé d’authentifier en leur attribuant une place dans l’ordre familial.
Chaque semaine, oncle Joseph reprenait donc ses opérations cabalistiques : inscrire de mystérieuses croix sur son bulletin de participation. Jouer ses quelques francs en espérant les récupérer à la fin du week-end, pour pouvoir les rejouer la semaine suivante. Sans aucune passion ni espoir de fortune – il n’y avait pas grand-chose à gagner il me semble -. Mais avec une application et une discipline sans faille. Comme un devoir dont eut dépendu la bonne rotation de la terre : impératif et répété, mais aussi partagé avec tant d’autres que son résultat ne fait plus aucun doute, ou que la fatalité de sa fin ne fasse plus vraiment peur.
Le pronostic était comme le miroir de la marâtre de Blanche Neige : « Pronostic, joli pronostic, dis moi s j’ai encore un tout petit peu de chance et d’habileté… » Un miroir un peu fatigué, qui toujours aurait répondu que s’il y en avait peut être de plus chanceux, on n’était finalement pas si mal. Un peu comme le miroir de votre salle de bain, si vous voyez ce que je veux dire !
En fait, Oncle Joseph n’était pas plus notre oncle que tante Catherine n’aurait eu un quelconque lien de parenté avec nous. C’étaient juste de ces parentés de quartier, dans lesquelles les liens d’affection sont parfois plus fort que ceux du sang. De ces délégations d’autorité et d’amour que l’on se croyait forcé d’authentifier en leur attribuant une place dans l’ordre familial.
Chaque semaine, oncle Joseph reprenait donc ses opérations cabalistiques : inscrire de mystérieuses croix sur son bulletin de participation. Jouer ses quelques francs en espérant les récupérer à la fin du week-end, pour pouvoir les rejouer la semaine suivante. Sans aucune passion ni espoir de fortune – il n’y avait pas grand-chose à gagner il me semble -. Mais avec une application et une discipline sans faille. Comme un devoir dont eut dépendu la bonne rotation de la terre : impératif et répété, mais aussi partagé avec tant d’autres que son résultat ne fait plus aucun doute, ou que la fatalité de sa fin ne fasse plus vraiment peur.
Le pronostic était comme le miroir de la marâtre de Blanche Neige : « Pronostic, joli pronostic, dis moi s j’ai encore un tout petit peu de chance et d’habileté… » Un miroir un peu fatigué, qui toujours aurait répondu que s’il y en avait peut être de plus chanceux, on n’était finalement pas si mal. Un peu comme le miroir de votre salle de bain, si vous voyez ce que je veux dire !
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