lundi 13 octobre 2008

Fonds de tiroirs

Quoi, déjà l’avant-veille ? Et moi qui n’ai pas encore vidé tous mes tiroirs !

J’aurais encore voulu vous entretenir de tas de choses, et presque chaque jour qui passe réveille l’un ou l’autre souvenir. En la parcourant, ma mémoire m’apparaît comme ces veilles maisons, habitées par des générations successives qui y ont abandonné surtout ce dont personne ne se préoccupe, les choses qui ne feront jamais l’objet d’une vente ou d’un héritage, tous ces objets et ces instants ridicules qui font pourtant l’essentiel de notre vie.

Un vieux bâton de réglisse, déjà tout mâchouillé. Quelques emballages de bazookas. Un calendrier du petit farceur. Un blazer pour la communion du gamin. Un bocal à bonbons au couvercle transparent. Des bottes de caoutchouc. Un cahier vert avec les tables de multiplications sur la quatrième de couverture. Quelques caleçons et singlets. Une carabine à plombs. Un émetteur-récepteur de CB.
Les CCC. Une ceinture de sécurité avant qu’elles ne soient à enrouleur. La CGER. Une charge de cavalerie du côté de la place Rouppe. L’odeur du chocolat à la gare du midi et celle de chou à l’avenue Wielemans. Une cireuse électrique pour les parquets. Une friture qui s’appelait « le colonial ». Un Commodore 64. Quelques copocléphiles (pas de panique, ce ne sont que des collectionneurs de porte-clefs !). La cour qui était synonyme de toilette.
Une cuchnee. Ma dernière cutiréaction. Un ou deux doryphores dont j'admire les couleurs. Un double carburateur en tête. Une rivière pleine d’écrevisses. Une dose de Fénergan pour faire dormir les enfants. Les filigranes du papier Steinbach. Un film 110. La RTB qui quitte Flagey pour aller à Reyers. Le flash-cube.
Le franc belge. Franco. Jean Claude Darnal. Les jeux sans frontières. Une machine à laver en cuivre. Dans chaque ville au moins une maison de la sorcière. Le maître et la maîtresse qu’étaient alors les instituteurs. La malle Ostende Douvres. Une pile de Marabout flash sur les sujets les plus bizarres (j’écris mon blog ?). La messe de minuit à minuit.
La mire annoncée par la brabançonne et rythmée par une ritournelle de Grétry. Quelques mouchoirs en tissus oubliés. Un pain blanc. Le passe vite. Une permanente qui ressemble à une choucroute. Quelques pommes de terre pètées. Le petit séminaire. Un Pif Poche tout déchiré. Des draps de pilou. Un jeu de pinces à linge en bois.
Quatre pneus à clous. Notre première poêleTefal. Le bureau de pointage et sa file de chômeurs. Un pompiste pour servir l’essence. Un paquet de Printen pour la Saint Nicolas ou la Noël. Robert Cogoy. De la rouille à n’en plus finir. L’émission les routiers sont sympas écoutée sous les couvertures. Le magazine Samedi Jeunesse des enfants sages. Mon père qui simonise la voiture.
Des cartes à jouer dans les rayons du vélo. La voisine qui trait ses vaches à la main. Les Trois Cloups. Un ou deux trotskistes égarés. Un cochon égorgé dans la cour de l’école. Une bouteille pour piéger des vairons. Les piles Varta. Et une bonne dose de vitamines pour faire passer le tout.

Mais, le tiroir ainsi vidé, n’oubliez surtout pas de prêter attention au papier qui en couvre le fond. Il peut révéler des merveilles. Ce sera un bout de papier peint peut-être : d’un motif qu’on ne fait plus, enlaçant des fleurs et des oiseaux dans une joyeuse sarabande. Ou alors, un journal, soigneusement plié, il y a cinquante ans au moins, et qui - ignorant le temps passé - répètera fidèlement les nouvelles du jour d’alors. A moins que l’on ait caché quelque chose dessous ?
Allez-donc y voir vous-même. Dans vos propres tiroirs aussi. Pour ma part, j’en ai presque fini avec mes rangements.

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