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lundi 13 octobre 2008

Fonds de tiroirs

Quoi, déjà l’avant-veille ? Et moi qui n’ai pas encore vidé tous mes tiroirs !

J’aurais encore voulu vous entretenir de tas de choses, et presque chaque jour qui passe réveille l’un ou l’autre souvenir. En la parcourant, ma mémoire m’apparaît comme ces veilles maisons, habitées par des générations successives qui y ont abandonné surtout ce dont personne ne se préoccupe, les choses qui ne feront jamais l’objet d’une vente ou d’un héritage, tous ces objets et ces instants ridicules qui font pourtant l’essentiel de notre vie.

Un vieux bâton de réglisse, déjà tout mâchouillé. Quelques emballages de bazookas. Un calendrier du petit farceur. Un blazer pour la communion du gamin. Un bocal à bonbons au couvercle transparent. Des bottes de caoutchouc. Un cahier vert avec les tables de multiplications sur la quatrième de couverture. Quelques caleçons et singlets. Une carabine à plombs. Un émetteur-récepteur de CB.
Les CCC. Une ceinture de sécurité avant qu’elles ne soient à enrouleur. La CGER. Une charge de cavalerie du côté de la place Rouppe. L’odeur du chocolat à la gare du midi et celle de chou à l’avenue Wielemans. Une cireuse électrique pour les parquets. Une friture qui s’appelait « le colonial ». Un Commodore 64. Quelques copocléphiles (pas de panique, ce ne sont que des collectionneurs de porte-clefs !). La cour qui était synonyme de toilette.
Une cuchnee. Ma dernière cutiréaction. Un ou deux doryphores dont j'admire les couleurs. Un double carburateur en tête. Une rivière pleine d’écrevisses. Une dose de Fénergan pour faire dormir les enfants. Les filigranes du papier Steinbach. Un film 110. La RTB qui quitte Flagey pour aller à Reyers. Le flash-cube.
Le franc belge. Franco. Jean Claude Darnal. Les jeux sans frontières. Une machine à laver en cuivre. Dans chaque ville au moins une maison de la sorcière. Le maître et la maîtresse qu’étaient alors les instituteurs. La malle Ostende Douvres. Une pile de Marabout flash sur les sujets les plus bizarres (j’écris mon blog ?). La messe de minuit à minuit.
La mire annoncée par la brabançonne et rythmée par une ritournelle de Grétry. Quelques mouchoirs en tissus oubliés. Un pain blanc. Le passe vite. Une permanente qui ressemble à une choucroute. Quelques pommes de terre pètées. Le petit séminaire. Un Pif Poche tout déchiré. Des draps de pilou. Un jeu de pinces à linge en bois.
Quatre pneus à clous. Notre première poêleTefal. Le bureau de pointage et sa file de chômeurs. Un pompiste pour servir l’essence. Un paquet de Printen pour la Saint Nicolas ou la Noël. Robert Cogoy. De la rouille à n’en plus finir. L’émission les routiers sont sympas écoutée sous les couvertures. Le magazine Samedi Jeunesse des enfants sages. Mon père qui simonise la voiture.
Des cartes à jouer dans les rayons du vélo. La voisine qui trait ses vaches à la main. Les Trois Cloups. Un ou deux trotskistes égarés. Un cochon égorgé dans la cour de l’école. Une bouteille pour piéger des vairons. Les piles Varta. Et une bonne dose de vitamines pour faire passer le tout.

Mais, le tiroir ainsi vidé, n’oubliez surtout pas de prêter attention au papier qui en couvre le fond. Il peut révéler des merveilles. Ce sera un bout de papier peint peut-être : d’un motif qu’on ne fait plus, enlaçant des fleurs et des oiseaux dans une joyeuse sarabande. Ou alors, un journal, soigneusement plié, il y a cinquante ans au moins, et qui - ignorant le temps passé - répètera fidèlement les nouvelles du jour d’alors. A moins que l’on ait caché quelque chose dessous ?
Allez-donc y voir vous-même. Dans vos propres tiroirs aussi. Pour ma part, j’en ai presque fini avec mes rangements.

jeudi 2 octobre 2008

Coupe-frites

Les frites d’alors étaient faites avec des pommes de terre… qu’il fallait éplucher… et qu’il fallait couper… avec un coupe-frites dans le meilleur des cas !

Chacun faisait alors – en Belgique au moins – ses frites à la manière des professionnels.
Eplucher ses pommes de terre d’abord. Les familles nombreuses avaient parfois une machine à éplucher. Une sorte d’essoreuse dont le tambour était couvert d’aspérités. Bien pratique pour les grandes quantités. Et un bon entrainement pour celui qui, comme moi, un jour se retrouvait à l’épluchage des patates dans un hôtel restaurant.
Les couper ensuite. Au couteau, si l’on voulait. Cela faisait des frites bien irrégulières. Artisanales dirait-on aujourd’hui pour les vendre plus cher. Ou au coupe-frites. On abaissait une manette, qui poussait la patate – épluchée au préalable – à travers une grille plus ou moins fine.
Les frire enfin, en deux fois, ce qui faisait toute la différence entre la Belgique et le reste du monde. Une première fois pour les cuire… la deuxième pour leur donner leur croquant final. Les Belges d’aujourd’hui mangent les mêmes frites surgelées que les Français, mais ils prétendront longtemps encore que les leurs sont incomparables : à cause de la double cuisson évidemment !

lundi 29 septembre 2008

Fusibles

Par temps d’orage, il n’était pas rare, dans les veilles maisons, que les plombs sautent. Il suffisait alors de les ponter. Et la lumière revenait.

Inconcevable aujourd’hui : ponter un fusible ! Sécurité, sécurité et encore sécurité ! Tout doit être garanti, sans danger. Et tout ce qui n'est pas garanti ni sécurisé est illégal !
Il faut dire que les tableaux électriques d’alors étaient de beaux foutoirs. Et les câblages des maisons des sources d’étincelles.
Alors, les fusibles n’étaient qu’un détail et faisaient exactement ce qu’on leur demandait de faire : fondre ! Il suffisait alors de passer une boucle de fil de cuivre entre les broches ; de remettre le fusible en place, et le tour était joué. Rien de bien grave, et la plupart des maisons belges n’en brulaient pas.
Sauf…
Sauf quand l’électricien improvisé avait la main lourde. Et après avoir ponté dix fois de suite, garantissait son ouvrage de deux, trois ou quatre boucles de cuivre au lieu d’une. Et le fusible chauffait… mais ne fondait pas…

mercredi 24 septembre 2008

Acier froid

Le quai de la gare de Verviers sentait l’huile et l’acier froids. L’acier froid surtout !

Si certaines gares disent le passage, d’autres ont vocation de terminus. Celle de Verviers était de ces dernières. Et bien qu’un tunnel la traversait de part en part – qui devait bien mener quelque part, vers un plus loin et un autre ailleurs – on avait l’impression que le monde s’y arrêtait, tant il y faisait sombre, et qu’il semblait impossible d’imaginer plus sombre encore !
Le hall proclamait un glorieux passé qui ne vivait plus que dans l’esprit embrumé des plus vieux de ses habitants. Glorieuse architecture vantant les mérites des artisans lainiers de jadis. Mais la ville était morte. Les usines fermées. Les artisans depuis longtemps partis, retraités ou morts. Seul le buffet dégageait encore un peu de chaleur et invitait à rester un instant encore. Juste le temps de sauter dans le prochain train… ou de s’en aller avec le prochain bus.
Et puis sur le quai cette odeur typique, de roues raclant les rails, de freins arrêtant les trains, de caténaires perclus d’humidité, d’ombre et d’âge. L’on respirait à courtes inspirations des morceaux entiers de locomotives, des mètres de rails. Et ce n’était pas vraiment désagréable. Un peu comme ces tabacs de pipe, parfumés au miel ou aux épices, dont on traverse la fumée en se retenant : d’inspirer trop fort, au risque de capturer avec le miel, toute l’amertume… et d’expirer trop vite, pour garder un instant encore les notes magiques. Ou comme ces parfums qui surgissent au passage d’une dame… et qu’il ne sert à rien de tenter de respirer encore: juste d’en garder, un instant encore, le peu qu’on a pu en capturer.

mercredi 3 septembre 2008

Firlon

Nous avions bien des arcs, mais ils étaient tout à fait inoffensifs. Par contre, avec un firlon, on pouvait faire bien des dégats !

Le firlon, c’était le lance pierre. Une arme parait-il ! Nous étions donc tous, un jour ou l’autre, armés !

vendredi 8 août 2008

Femmes à gauche

L’église pratiquait la séparation des sexes. A la messe, les femmes se tenaient à gauche, les hommes à droite.

Nous, les enfants, suivions nos mères – évidemment -. Mais la ségrégation était la règle. Le troupeau se divisait en deux.
Ainsi, pendant la cérémonie, les regards de chacun des deux sexes ne serait-il pas troublé par la vue de l’autre. Les pensées resteraient pures. Seule la religion habiterait les esprits.

dimanche 13 juillet 2008

Foins

Les foins : on était plus nombreux à les faire plutôt que d’en avoir le rhume !

Le petit fermier d’en face d’abord. Que je vois encore sur son petit tracteur. Ou son fils. A la barre faucheuse longtemps. Plus tard à la faucheuse à disque. Tondre leurs minuscules prairies et y ériger quelques meules quand le foin y serait à peu près sec.
Plus tard, alors que nous habitions sur les hauteurs de la ville, ces visites impromptues du fermier voisin. A la recherche de bras lorsque la pluie menaçait. Il faut dire qu’il ne suffisait pas à l’époque d’un tracteur ou deux de plus, pour charger d’immenses balles ou des rouleaux – quand on ne les laisse pas simplement sur la prairie, enrobés de plastique – à la force hydraulique. C’est bien d’huile de bras qu’il fallait alors. Pour parcourir la prairie d’un pas rapide. Planter sa fourche dans un ballot. Le lever pour le passer à ceux qui chargeaient le char à foin. Lever de plus en plus haut. A bout de bras enfin, le souffle court, les jambes tremblantes, des ballots des plus en plus lourds.
Mais la fin du travail arrivait toujours. Alors que la poussière du foin était comme du papier de verre sur nos fronts et nos bras. Nos mouchoirs – de tissus évidemment – s’emplissaient d’une morve presque aussi noire que celle d’un mineur. Le repas du soir se prenait à la ferme. D’énormes tranches de pain couvertes de charcuteries et de fromages. De grandes goulées de sirop de sureau et de bière. D’eau aussi. Pour tenter de rendre à notre corps tous ces litres qu’il avait sués sous le soleil brulant. Dans la touffeur d’avant l’orage. Qui viendrait ou qui ne viendrait pas ! Mais peu importe, puisque les foins étaient rentrés.

mardi 17 juin 2008

Fagne mangeuse d'hommes

Les hautes fagnes sont dangereuses. On s’y perd. On s’enfonce dans leurs tourbières. On s’égare dans les brouillards et les tempêtes de neige. La fagne est une mangeuse d’hommes !

Il y avait bien les vieilles histoires. Celle de la croix des fiancés – de celles qui finissent mal, dans la nuit et dans la neige – de la chapelle Fischbach et de la baraque Michel – et de la cloche qui devait permettre au voyageur égaré de retrouver son chemin -. Mais tout cela datait de bien avant la naissance de mes grands-parents. Nous n’avions pas plus peur de nous perdre en fagne que de rencontrer le loup du chaperon rouge quand nous parcourions les bois ! Il fallait que cela change !
En 1969, le feuilleton « Les galapiats » y contribua. Le mauvais tombe dans les tourbières et ne doit son salut qu’à l’intervention du cow-boy de service. Les tourbières, c’est en effet terrible ! La marée du Mont St Michel, comparée aux tourbières, ce n’est rien du tout. On se fait avaler en moins de deux. En plus, il y a des plantes carnivores ! Ce n’est sans doute pas pour rien. Avec toute la viande de touristes perdus qui s’y trouve…
Vers la même époque aussi, il faut noter la contribution remarquable de l’université de Liège à une plus juste et plus complète connaissance de l’endroit. Un groupe d’étudiant s’est en effet perdu, en hiver. Perdus pour perdus, au lieu de suivre les vallées – vers les villes – ces idiots ont tenté de rejoindre leur point de départ. Ils furent retrouvés, frigorifiés, dans la nuit. La petite histoire racontait qu’ils n’avaient dû leur salut qu’à un étudiant vietnamien qui avait emporté de la viande séchée (gardée à même son corps, prétendait la rue).
Un feuilleton kitsch… une bande d’idiots en balade… et toute la confiance que nous pouvions avoir dans la fagne s’effondrait – pour les plus crédules en tout cas -. Et la légende est tenace.
Mais, au moins, elle a le mérite de garder la plupart des promeneurs sur les sentiers balisés et d’en tenir éloignés les moins téméraires ! Continuez donc à raconter ces terribles histoires. La fagne vous en sera reconnaissante !

jeudi 22 mai 2008

Feu Vert

Feu Vert, c’était Jacques Careuil, et Jacques Careuil, c’était Feu Vert !

Bon, il y avait André Rémy aussi, mais, Jacques Careuil, lui, avait une voix… inoubliable. Inimitable.
Feu Vert, c’était le jeu télévisé pour les enfants, le mercredi après midi. Des questions de connaissances. Des épreuves physiques. Des trucs inimaginables aujourd’hui dans leur élémentaire simplicité. Des chanteurs aussi : Robert Cogoi, Jean-Claude Darnal, Joe Dassin étaient abonnés de l’émission.
A vos marques, c’était pour les plus grands. Ceux de l’école secondaire. Des vieux, somme toute.
Il n’y avait pas grand monde pour manquer notre Feu Vert hebdomadaire.

dimanche 18 mai 2008

Bille de chemin de fer

Bille de chemin de fer. Nom féminin. Actuellement a) Objet en bois qui sert à décorer les jardins et n’a jamais vu passer un train b) Objet en béton qui sert à porter les voies. Jadis : un objet en bois qui servait à porter les voies… et n’avait jamais vu un jardin

D’accord, c’est pratique. Bien utilisé, on peut dire que c’est beau, à défaut d’être élégant. En tout cas, c’est solide.
Mais il en va de la bille de chemin de fer comme de la roue de charrette encadrée dans le mur des fermettes. Les véritables ont disparu… mais le marché en demande encore et toujours. La bille de chemin de fer sauvage, ayant vécu l’aventure du rail, subi les intempéries, et ayant été abreuvées de tous les produits les plus toxiques, a donc disparu. On ne livre plus donc, en jardinerie, proprement empaqueté et raboté, traité aux produits respectueux de l’environnement et sans dangers pour les enfants, que le la bille de chemin de fer d’élevage, qui n’imagine même pas les grands espaces et la vibration de boggies… ne rêvera jamais de liberté que face au gazon trop soigné et trop vert de nos villas.

samedi 3 mai 2008

Fourgon a bagages

Quand on partait en vacances en train, les bagages voyageaient dans le fourgon.

Pour l’avion, tout le monde trouve cela normal. On embarque léger. On ne s’encombre pas de tout un fatras de valises à trainer dans les couloirs et sur les rampes d’embarquement. Plus ou moins confiant, on se dit qu’il n'est pas nécessaire de garder un œil sur ses bagages pour qu’ils arrivent à destination.
Pour le train, c’était un peu la même chose. Arrivé sur le quai, un rapide passage à la dernière voiture, et l’on confiait ses bagages pour la durée du trajet. A destination, nouveau passage vers le fourgon pour récupérer ses valises et ses malles.
D’ailleurs, avec la fin de ces envois par train ont disparu les étiquettes qui agrémentaient les bagages de ceux qui avaient beaucoup voyagé. Ils servent encore d’accrochage visuel sur certaines publicités… restent associés à l’idée de villégiature… mais, comme la locomotive à vapeur – elle aussi surreprésentée – ils ont disparu de notre paysage.

dimanche 27 avril 2008

Ecole des filles

S’il y avait une école des filles, c’est bien qu’il y avait une école des garçons !

Prétendue naturelle à l’époque, cette séparation entre garçons et filles. Dix ans plus tard, elle était un enjeu. Dix ans après encore, elle n'était plus que risible et rétrograde.
Naturelle évidemment, puisque les filles étaient si différentes des garçons. Portaient des jupes. Sautaient à la corde. Jouaient à l’élastique. Riaient fort. Pleuraient. Crachaient et griffaient. Ou chantaient. Toutes des choses que jamais un garçon n’auraient faites. En tout cas, jamais dans une cour de récréation.
Une rue nous séparait. Pas tout à fait, puisque nous la traversions pour rejoindre certaines classes. Mais, c'est sûr, une rue séparait nos cours de récréation, et là était toute la différence.
Une rue et des siècles de culture.
Et pourtant, nous avions des sœurs !

jeudi 24 avril 2008

Huile de foie de morue

L’huile de foie de morue c’est vraiment dégueulasse !

Une véritable horreur. Un truc gluant et puant. Et il aurait peut-être fallu faire la file pour être servi, avoir sa dose, comme on le ferait pour une distribution de chiques ou de vitamines – ça au moins c’était bon, les vitamines ! -…
Tellement dégueulasse que même les pharmaciens s’en sont rendu compte et ont inventé la gélule d’huile de foie de morue. Un remède nettement moins rébarbatif… mais pas vraiment appétissant non plus. Au moins, avec une gorgée d’eau, la gélule était avalée… et pouvait disparaître au fond des entrailles pour y libérer – en même temps que ses relents d’origine – ses bienfaits prétendus.
Car, a en croire les anciens, sans cette huile de foie de morue, on ne passerait pas l’hiver… Sans elle, on deviendrait blancs comme des poireaux... On serait définitivement maigres et pâles...
Mais alors, si c’était si bon, si important et si vital finalement, pourquoi est-ce que eux, les adultes, n’en prenaient pas ?

mardi 22 avril 2008

Fete Dieu

De la fête Dieu, je n’ai vu que des ailes. De ces accessoires d’angelot, en tulle, qui devaient être portées par ma petite voisine d’en face.

Mes parents, bien que très religieux à leur manière, n’y participaient pas. Estimant que c’était tant de carnaval et si peu de religion. La laissaient donc aux vrais carnavaleux, les Malmédiens.
En grattant un peu encore ce qu’il me reste de mémoire de ces jours là, il me semble tout de même capturer encore une image. Le carrefour du début de la rue Chemin Rue parsemé de pétales de rose.
Et ça, c’est certain. Ca ne date pas du carnaval !

jeudi 27 mars 2008

Fumer dans le bus

Je suis né dans un monde qui sentait et goûtait le cendrier froid. Fumer dans les bus était normal.

Bus, trains, cafés, bureaux… il y avait des cendriers partout, qui sentaient le cendrier… le mégot… le pas frais… Qui gluaient sous les doigts... Qui rendaient les doigts amers...
Prendre le bus, c’était nécessairement se trouver pendant tout le trajet – et cela pouvait être long, de Malmédy à Verviers par exemple – devant un cendrier débordant de restes de tabac, de cendres et de chewing-gum mêlés.
C’était la plupart tu temps aussi subir l’odeur des cigarettes de deux ou trois fumeurs invétérés… en plus de celle de la transpiration ou des chaussettes pas fraiches. Parfois même celle d'un cigare ou d'une pipe. Lourds.
C’était enfin recueillir sur les mains agrippées à la barre de maintien les traces de ces effluves, pour les emmener ensuite, quand on quitterait le bus.
Prendre le bus, c’était – pour les narines - comme faire un voyage dans une cité africaine – les odeurs d’épices en moins !

dimanche 23 mars 2008

Bouts ferrés

Les souliers de ski avaient le bout ferré.

Je n’ai jamais cherché à savoir pourquoi, mais le bout des souliers de skis était recouvert d’une lame de métal. Je ne parle évidemment pas de ces véhicules extraterrestres que chaussent les skieurs de nos jours, mais bien des chaussures (quelque chose qui sert à marcher) que nous utilisions alors.
D’ailleurs, on pouvait utiliser des skis avec n’importe quelle chaussure. Mais, le chic du chic pour nous, c’était évidemment la chaussure de ski. A peine différente des chaussures normales. L’avant un peu plus carré peut-être. L’arrière renforcé pour recevoir le tendeur de l’attache. Mais surtout, ces pointes ferrées.
Menaçantes dans la cour de récréation. Les coups de pieds n’étaient pas rares et celui qui portait de telles chaussures bénéficiait surement d’un avantage – au moins psychologique – non négligeable.
Ou simplement fières de leur apparence. Quelques coups de la pointe sur les pavés de la cour, pour bien faire entendre le son du métal. Un regard de côté pour voir si le public avait bien remarqué la merveille que l’on portait aux pieds. Puis quelques pas un peu raides – comme si les skis y étaient restés attachés ou que la journée sur les pistes avait été bien longue - pour bien les mettre en valeur.

samedi 15 mars 2008

Thierry la fronde

Le héros de série télévisée le plus ridicule de tous les temps, avec ses collants de ballet, c’est bien Thierry la Fronde.

De 63 à 66 il en aura pourtant allumé des lumières d’intérêt dans les yeux de son public. Si les Américains avaient leurs Batman, Superman et autres la France et la Belgique francophone avaient Thierry la Fronde. Une série culte. Une des rares références télévisuelles de l’époque. Et une musique - ta tata ! - qui trotte encore dans la tête de tous ceux qui auront vécu cette époque.
Un véritable phénomène. Une longévité exceptionnelle.
Le nom de son acteur principal – Jean Claude Drouot – est sans doute oublié de la plupart des téléspectateurs d’alors… qui n'auront jamais reconnu que Thierry la Fronde dans tous les rôles qu’il aura pu endosser par la suite.
Mon petit frère en était fou. Moi, franchement, nettement moins. Je dois avouer n'en avoir vu que quelques épisodes qui ne m'ont laissé de souvenir attendri que de la fiancée du héros. Mais s’il me fallait sélectionner aujourd'hui deux ou trois séries à revoir pour me replonger dans l’époque, sans contexte je retiendrais « Belle et Sébastien », « Les galapiats » mais aussi « Thierry la fronde ».

samedi 8 mars 2008

Meules de foin

Au moins une fois l’an, les meules de foin poussaient dans les prairies.

Trois perches dressées, comme pour une tente d’indien. Le foin séchait sur les meules. Sortes de champignons qui émergeaient de temps en temps sur les prairies. Avec la mécanisation, elles ont disparu, et le foin en vrac a laissé sa place au foin en balles.
Reste-t-il encore l’un ou l’autre fermier qui résisterait à la nouvelle mode ? Si c’est le cas, ils sont tellement rares que je peux facilement compter celles que j’ai vues « récemment ».
Une fois, peut-être deux mais pas plus, dans ma rue. Un ridicule bout de prairie agrémenté de deux arbres, obstacle rédhibitoire à la mécanisation. J'y ai bien vu quelques meules, entre 91 et aujourd’hui… mais plutôt du côté de 91.
Une autre fois encore, plus récemment, sur un bout de prairie particulièrement enclavé, du côté de Roeselare. C’était il y a au moins 4 ou 5 ans… et je n’ai pas eu l’occasion de mener une nouvelle expédition anthropologique dans ce coin.
Une dernière fois enfin, il y a un an ou deux, aux Pays Bas, du côté de Valkenswaard, au sud d’Eindhoven…
N’oubliez donc pas, la prochaine fois que vous voyez une meule de foin. Arrêtez-vous. Prenez-la en photo. Retournez-y éventuellement avec vos enfants ou vos petits enfants. Prévenez la presse et la télévision. Arrêtez les voitures et ouvrez un blog !
S’il n’est pas déjà trop tard, il est vraiment grand temps !

samedi 1 mars 2008

Farde

Pour un fin dossier, ne dites pas chemise, dites farde, et pour une cartouche de cigarettes, dites farde aussi.

Google me propose d’essayer aussi classeur ! Mais un classeur, c’est plus gros. Une farde, c’est fin, compact. Et franchement, je préfère farde.
En plus, farde, c’est un mot pour faire rêver et voyager. C’est un mot arabe pour un colis porté par les animaux de bât ! Du tabac, du papier, rien que des matières précieuses et magiques.
Laissons donc les cigarettes françaises être livrées très militairement dans des cartouches… et les feuilles volantes de leurs petits élèves être ordonnées strictement dans des classeurs… Chez nous l’un et l’autre continueront je l’espère à nous être livrés par des chameliers, dans des emballages aux odeurs de miel, d’épices et de soleil !

mercredi 20 février 2008

Fil à linge

Le lundi, le fil à linge s’habillait de frais.

Un seul jour pour la lessive ? Vous n’y pensez pas, des monceaux de linge s’accumuleraient ! Et dépendre de la météo pour le séchage ? Nous vivons en Belgique tout de même, soyez sérieux !
Le fil à linge a donc disparu de nos paysages du Nord. Il ne figure plus qu’au rang des curiosités touristiques de Naples et autres villes italiennes. Ou bien de charge anachronique pour ceux qui font du camping.
Et pourtant, le fil à linge, c’était tout un monde à explorer.
Un terrain de jeu. Pour se cacher, au risque bien réel de faire tomber le linge, et de devoir en assumer les terribles conséquences.
Un reflet indiscret de ce qui se passe dans la maison. Si « on lave son linge sale en famille », pour les sécher, le grand et le petit linge sont bien exposés aux regards de tous.
Le lieu de l’insolite parfois. Quand par exemple les draps de lit encore humides, pris par le grand gel, sont devenus comme des tôles étranges. En les pliant on pensait briser une immense ostie.
Sujet éternel de gags et de clins d’œil pour le cinéma et la bande dessinée enfin. Avec des histoires drôles et d’autres qui l’étaient bien moins tant elles étaient éculées.
Tout un univers disparu. Comme une forêt qui aurait existé dans chacun de nos jardins. Et que toutes, en une nuit, sans qu’on s’en aperçoive, aient disparu à jamais !