jeudi 31 juillet 2008

Via secura

C’était du temps où la sécurité routière était nationale, et s’appelait Via Secura.

Un temps où les voitures étaient faites de tôle légère. Où les 4x4 étaient l’exception plutôt que de devenir la règle. Où les voitures étaient bien moins nombreuses, et la vitesse bien moindre. Où les enfants allaient encore tous à l’école à vélo ou à pied - et si la route prenait parfois son tribut, c'était encore assez exceptionnel pour que cela serve de leçon aux autres -. Où la rue, pourtant bien droite sur quelques centaines de mètres, nous servait de terrain de football.
Le plus étrange, rétrospectivement ?
La ceinture de sécurité. D’abord il n’y en avait tout simplement pas. Avant qu’elle ne soit installée sur les voitures. Mais personne ne l’utilisait. Puis qu’elle devienne obligatoire à l’avant. Mais la police ne contrôlait pas. Puis seulement à l’arrière. Combien de centaines de morts aura-t-il fallu avant qu’on ne prenne cette décision toute simple ? Et combien en faudra-t-il encore avant que les bus, les trams et les trains en soient aussi équipés.
Le casque moto ensuite. Imaginez-vous donc que, lui non plus, n’était pas obligatoire. Que beaucoup de motards roulaient sans. Et que la plus grande fantaisie régna ensuite sur les différents types de casques que l’on rencontra. Le bol avec sa garniture de cuir sur les oreilles est bien loin de la sécurité des casques intégraux actuels.
Sans parler du casque vélo. Et n’allez pas y voir les choses modernes et fluorescentes que portent nos cyclistes aujourd’hui. Que non. Un casque vélo, c’étaient simplement une série de boudins de cuir, remplis de je ne sais quoi. Par contre, comme sa version actuelle, alors que les cyclistes en reconnaissaient l’utilité – toute relative -, ils ne voulaient pas le porter. Trop chaud. Gênant. Et peu leur importait déjà la perspective de répandre leur cervelle sur le bitume.

mercredi 30 juillet 2008

Les portes du penitencier

C’était du temps de Ceausescu.

Nous avions, je crois, débarqué du côté de Chilia Veche – sur le Nord du delta du Danube -, et on reprendrait le bateau à Sulina – sur les rives de la mer Noire -. C’était en Roumanie, du temps de Ceausescu, il y a 30 ans au moins.
Avec une bande de copain, nous nous étions enfoncés dans le delta. Dans la benne d’un tracteur, qui faisait transport public. Jusqu’à un village plus loin. A proximité des marais. Et des oiseaux sauvages. Nous campions au cœur du village, sur un espace ouvert, qui devait servir à tout. De place du village parfois, de terrain de foot, de salle de bal même.

La nuit tombée, les musiciens sont arrivés, et les danseurs. Un joueur de grosse caisse, l’autre d’accordéon. Je ne sais lequel a commencé. Ce devait être la grosse caisse : boum-boum, boum-boum, boum-boum. Comme un cœur qui bat. Boum-boum, boum-boum, encore et toujours. Puis l’accordéon de démarrer sur « The House of the Rising Sun » (Les portes du pénitencier pour ceux qui préfèrent Johnny Halliday), et de continuer sur le même air, sans fin. Les portes du pénitencier et le boum-boum du tambour dans la nuit du delta… Enfin, les danseurs qui s’y mettent. Quelques femmes, et bien trop d'hommes, chaloupant deux à deux – mais ils ne devaient pas être bien nombreux – dans leurs pauvres vêtements de paysans communistes. Piétinant doucement le sable de la piste de danse improvisée.
La nuit était totale. Et le village n’avait aucun éclairage. Ce bal improvisé non plus. Dans ma tente, la valse de l’accordéon - jouant et rejouant sans fin le même morceau -, le grondement de la grosse caisse, le frôlement des danseurs que l’on devine, ont servi de berceuse à un sommeil lourd, si lourd.

Leur danse était aussi sincère et pathétique que celle de l'ours enchainé et muselé par le Rom. Marchant tristement sur les routes de l'Est derrière la carriole à deux roues des nomades.

mardi 29 juillet 2008

Visa pour le monde

Tous les dimanche après-midi, la Belgique regardait « Visa pour le monde » !

Chaque semaine on voyageait avec les candidats du jeu concours. On tremblait avec eux. On rêvait comme eux de ce prix incroyable : un tour du monde. Un vrai. Comme celui de Jules Verne, ou de Magellan. Un de ces cadeaux énormes, formidables et – somme toute - totalement inutiles. Qui en faisaient donc encore plus rêver !
Quand le candidat ne connaissait pas la réponse, il pouvait faire appel au téléphone. Demander pour ce faire une valise. « Maryse, une valise ! » entendrai-je encore résonner dans un coin de ma tête, chaque fois que je penserai à « Visa pour le Monde ».

lundi 28 juillet 2008

Univers (Tout l')

« Tout l’Univers » était à l’Encyclopedia Universalis et au dictionnaire Larousse ce que « la tour de garde » est à la Bible: rien qu'une divagation pitoyable sur le même thème.

Pas plus que des rumeurs, l’Internet n’a été la première à enfanter d'approximations douteuses. Elles étaient là bien avant. Pour notre plus grand malheur, certains de nos instituteurs avaient de bien piètres lectures. Et dans le monde agité par la tornade du modernisme des années 50 et 60, où la télévision ne prenait pas grand place encore, les lectures, et leur choix, faisaient évidemment l’homme.

Il y avait ceux qui ne se rendaient pas compte que le monde changeait. Qui, du fond d’un grenier, d’un coin de remise dans l’école communale, extrayaient un bout de livre qui, croyaient-ils, expliquait tout. Le monde. La vie. Les choses. Pour peu que le livre soit de qualité, ce n’était pas bien grave. Ils se rendaient vite compte, avec nous, que Malmedy n’était plus en Prusse depuis longtemps et que leurs manuels ne nous livreraient aucune explication sur le fonctionnement de la locomotive diesel. Et s’ils parlaient d’un monde un peu couvert de poussière, encore celui-ci était-il solide et véridique. Un peu trop peuplé d'exemples anciens, d'objets et de personnages qui voguaient vers l'oubli. Mais, reconnaissons-le, les baignoires qui fuient et les robinets qui coulent ainsi que les trains qui roulent l'un vers l'autre n'ont pas, du jour au lendemain, changé les lois de la mathématique sous l'effet de l'apparition du vinyl, du diesel ou de la généralisation de l'eau chaude dans les salles de bain.

Il y avait ensuite ceux qui ne juraient – déjà – que par la vulgarisation. Parce que, le plus souvent, c’était la seule qu’ils comprenaient. Ils étaient faciles à reconnaître eux aussi, s'enthousiasmant, au fil des parutions de Science et Vie ou d’un article dans la presse, pour tel ou tel nouveau sujet. Tête baissée, ils fonçaient vers le futur. Déliraient tout éveillés, avec les auteurs d’alors, sur cet an 2000 qui nous semblait si éloigné. Mais finalement, ils n’y comprenaient pas grand-chose. Tout juste attachés aux épiphénomènes – le poids du téléphone bracelet, la taille de la fusée qui nous emmènerait sur la lune et le nombre exact des passagers, la vitesse du train -, ils en oubliaient de nous enseigner l’essentiel : quelle technique ou quelle loi de la physique permettrait ces futurs et si prochains miracles. Semblaient tenir pour négligeable que nous serions de ces temps, qu'ils décrivaient dans leur folie anticipationiste, pour leur donner un jour tort ou raison. Au moins leur passion valait-elle la peine d'être transmise à la génération montante.

Les derniers enfin – il y a prescription, mais permettez-moi de ne pas citer de nom -, imbus de leur ignorance, le mégot fumant au coin de la bouche, la baguette à la main – qui claquait sur le tableau, sur une table, sur une main parfois -, pitoyables missionnaires de l’approximation, répétaient – mal – ce qu’ils avaient lu dans des publications douteuses. Et, si par hasard le doute émergeait malgré tout d’une tête ainsi quotidiennement lobotomisée, l’argument d’autorité était toujours le même : c’était écrit dans « Tout l’Univers ». C'était donc vrai ! De même qu'avant eux, et aujourd'hui encore, de stupides censeurs de toutes les religions ont toujours prétendu dicter les formes du monde au gré du grand livre de leurs propres ignorances !

dimanche 27 juillet 2008

Telegramme

Télégramme et telex on rejoint le musée où le fax les rejoindra bientôt !

Le telex, c’était pour les entreprises, pour les banques. Pour des communications super importantes. Pas pour le peuple.
Le télégramme, c’était aussi important. Le messager des grands moments : une naissance, un décès. Celui des urgences aussi. Il atteignait même ceux qui n’avaient pas le téléphone.
Un statut d’autant plus particulier qu’il figurait dans tous les types de récits : dans la bande dessinée, dans les romans, dans les sketches et dans les chansons…
Tout le monde connaissait le télégramme. Mais combien en ont effectivement reçu ? Pour ma part, j’en ai seulement une fois tenu un en main… Qui ne m’était même pas destiné et que je n’ai donc jamais lu. Mais, plus étrange encore, il me semble me souvenir d'en avoir un jour envoyé un. Raté encore... celui là non plus, je ne l'ai ni reçu, ni lu !

samedi 26 juillet 2008

Sprotchi

C’est todi lu p’tit qu’on sprôtche !

Pour ceux qui ne parlent pas le Belge : « C’est toujours le petit qu’on écrase. »
Sprôtchi, c’est un des plus beaux verbes de la langue wallonne. Un de ces mots qui s’accompagne nécessairement d’une rotation du doigt sur la table ou du pied sur le sol. Porteur d’une infinité de nuances dans l’intonation, au point qu’on pourrait croire qu’une mesure précise de la longueur du « ô » pourrait nous dire la sévérité de l’écrasement et de l’étalement de la victime…
Un chat sur la route ? Sprôtchi ! Le hamster sous le tapis ? Sprôtchi de même ! La voiture du voisin, après la tempête et ses chutes d’arbres ? Sprôtchie…
Laissez voguer votre imagination au gré du mot. Vous verrez que vous en trouverez bien d'autres usages.

vendredi 25 juillet 2008

Rasprutcher

Il m’a tout rasprutché !

Juste pour le plaisir du mot en bouche. Rasprutcher, c’est arroser, éclabousser… avec un pistolet à eau par exemple. Ou mieux, au tuyau d'arrosage.
Vous ne l'avez jamais fait peut-être ?

jeudi 24 juillet 2008

Quincaillerie

Aujourd’hui, on va au brico,… on allait alors à la quincaillerie !

Une sorte de caverne d’Ali Baba.
Avec son gardien d’abord. Une sorte d’ogre peut-être. Aimable comme une porte de prison. Ou bien si lent. Trainant ses savates d’un rayon à l’autre. Plus fatigué à chaque commande. Ou alors agité, agile et sautillant. Si rapide que notre imagination ne le suit pas : une vis à pas droit ou à pas gauche ? d’acier ou de laiton ? Indispensable en tout cas. D’ailleurs, rien n’était en libre service alors. Et ce n’était pas plus mal. En un instant ou en cent, il vous trouvait l’objet rare. L’outil inimaginable. Résolvait en une seule visite ce qu’il vous aurait fallu des semaines à concevoir.
Le quincailler c'était une sorte de docteur des choses !

mercredi 23 juillet 2008

Papier buvard

Théoriquement, le papier buvard servait à éponger l’encre… En pratique, il en allait bien autrement !

Artistique… Posez la pointe de votre stylo sur un papier buvard, et observez le boire l’encre. La tache se répandre. Essayez d’en faire quelque chose d’esthétique. Essayez de contrôler la vague bleue qui parcourt le rose du papier. N’oubliez pas de laisser assez d’encre quand même dans votre stylo pour pouvoir écrire quand le maître recommencera sa dictée…
Médical… Il parait que le buvard humide dans les chaussures donnait la fièvre. Qu’il pouvait ainsi, au moment opportun, permettre d’éviter un examen ou une interrogation redoutée. Le seul problème est que la posologie et le monde d’application sont bien vagues. Et que je n’ai jamais réussi à appliquer une recette, soi-disant, infaillible.
Cancre… Dépourvue de colle, la cellulose des papiers buvard fait les meilleures boules de papier mâché dont on peut rêver. Roses, elles se détachent particulièrement bien sur le plafond blanc de la classe où les cancres les ont projetées. Plus elles sont grosses, plus grande est la gloire… Un jour peut-être, le ciel de la classe, sera-t-il entièrement rose !
Tactile… Doux, ou presque…. Mais il y avait des fibres plus dures dans le papier buvard. Comme des éclats de verre. Qui faisaient qu’il n’était pas si agréable que ça à manipuler. Qui fait qu’on n’aurait pas posé sa joue contre – juste pour le plaisir – alors qu’il ne devait être fait que de cellulose.
Nasal… Acide. L’odeur du papier buvard n’était pas agréable. Comme le toucher. Un peu paradoxale… On aurait attendu une odeur plus en harmonie avec le rose de sa couleur…
Non, le buvard était un jeu… mais un jeu un peu bizarre… et pas tout à fait aussi agréable qu’on aurait pu l’espérer.

mardi 22 juillet 2008

Odeurs

Fermez les yeux, laissez aller votre mémoire. Arrêtez de vous souvenir avec votre tête. Souvenez-vous avec votre nez !

Souvent, il m’arrive de me trouver en éveil. Comme un chien de chasse. De tendre la narine gauche. Puis la droite. D’entrouvrir la bouche. De tenter de capter tel arôme qui vient de passer.
Ou quand je mange, ou que je bois, de fermer les yeux. De sentir ma perception qui bascule de l’avant, de mes yeux et de ma pensée, vers quelque chose qui se trouve bien en arrière. De très animal.
Sentir mes doigts, à l’instant. Imprégnés de fumée. Souvenir de cigarettes. Poisson, jambon fumé. De feux de camps.
Boire une bière. Etre frappé par un goût. Ne pas pouvoir le nommer tout de suite. Les yeux fermés, aller de gauche et de droite. A travers des mémoires proches et d’autres bien plus lointaines. Trouver finalement. Le houblon tout simplement. Ou bien la pêche. Là où d’autres nommaient la vanille.
Entrer dans une maison parfois. Et laisser notre nez évoquer les souvenirs. Le moisi de tel immeuble. L’odeur de vieux – d’urine, de merde et de vieille sueur – ailleurs. Le bois ou la cire. Le pavé ou la dalle de schiste. Et voyager. Retrouver des moments si passés qu’on ne s’en souvenait plus. La descente de l’escalier de la cave de notre grand-mère… L’odeur que dégageait celui du grenier lorsqu'on posait ses pieds sur chaque marche… Celle de la haie du voisin… Reconnaître avant de l'avoir vue une personne qui n'est déjà plus là.
Dire un mot, et l'instant d'après, le naseau frémissant, avoir l'impression que le nez pourrait encore sentir ce qui n'est que dans la mémoire. Toute une histoire et une géographie en parfums.
Rouler en voiture et dire la menthe sauvage, puis l'ail, ici un animal mort, la ville et maintenant la mer: vase et iode.

Il faudrait pouvoir écrire les odeurs, ou les photographier !

lundi 21 juillet 2008

Nuits d'été

Si William Shakespeare a ses songes d'une nuit d'été, personne ne m’enlèvera mes odeurs d’une nuit d’été !

C’était entre Rocherat et Bullange.
En 1964 peut-être. Sinon, à l’été 1965.
Nous faisions un jeu de nuit dans un de ces terrains vagues couverts de ronces, de muriers, d’épilobes et de fougères aigles.
Il y faisait si nuit et si chaud. C’était en juillet sans doute.
J’ai encore le nez plein de ces odeurs de plantes. Une odeur qui habille le nez. Une odeur qui pourrait être celle d’aisselles, de sexe et de sueur. De parfums trop lourds et d’alcools trop forts.

dimanche 20 juillet 2008

Machefer

« Le mâchefer est le résidu solide de la combustion du charbon ou du coke dans les fours industriels ou bien encore de celle des déchets urbains dans les usines d'incinération. » Wikipedia

Wikipedia oublie que - du temps du poêle à charbon - les foyers domestiques produisaient aussi leur lot de mâchefer. Régulièrement. Etait-ce une fois par semaine ou moins ? Il fallait nettoyer le foyer. En arracher la croute solide qui se formait au fond. Le seau à charbon devenait seau à déchets. Et le mâchefer terminait sa carrière dans le jardin.
Proprement concassé, il constituait l’essentiel des chemins qui parcouraient plates bandes et potagers. Il avait une odeur. Une certaine acidité. Comme celle d’une tôle rouillée. Et un son particulier. Un crissement entre pierre, verre et métal quand on tentait de le concasser. Quand on voulait l’organiser.

samedi 19 juillet 2008

Lamproie

La lamproie marine est un agnathe (n'a pas de véritables mâchoires, mais seulement un disque buccal garni de nombreuses pointes cornées), un vertébré marin primitif qui vit dans l'Atlantique Nord. Elle se reproduit en eaux douces.

Je m’en souviendrai toujours. C’était à la première carrière. Là où mes parents nous emmenaient parfois nager le dimanche. La goffe était trop loin. La voiture n’y arrivait pas.
Un jour donc, une pierre était couverte d’anguilles aurait-on dit. Une pierre couverte de lamproies, comme une tête de gorgone de ses vipères. Des centaines d’animaux, plus fins que le petit doigt, agités par le courant de la rivière.
Les plus intelligents auraient prétendu qu’il s’agissait d’anguilles. Vaguement logique. Crédible. Pas tout à fait idiot.
Certains – encore faudrait-il admettre qu’ils étaient la majorité – auraient cru à des serpents, n’auraient rien vu, ou insisté pour que leurs enfants ne les embêtent pas avec des choses sans queue ni tête – et pourtant, la lamproie a une tête bien puissante ! -.
Il aura fallu ma mère – seule entre tous - pour me parler d’un animal que je n’avais vu dans aucun livre. Le nommer. Et donner du sens à une rencontre tout à fait exceptionnelle. Qui d’entre vous a vu une lamproie ? Et la mère de qui d’entre vous, aurait-elle été capable de la nommer ?

vendredi 18 juillet 2008

K-nex

Mecano, Lego… ça c’étaient de vrais jeux de construction ! Comme le Scalextrix, presque une culture.

Lego et Mecano étaient les derniers d’une génération. Sur la base de quelques pièces très simples, une dizaine au maximum, et de deux ou trois couleurs, l’enjeu était de représenter le monde ! de le rejouer ! d’en décrire l’infinie variation. Comme on le fait avec un alphabet en occident, où nos 26 lettres nous permettent de dire tous les mondes passés, présents, à venir ou à imaginer !
Nous étions Lego à la maison. Et j’ai du passer des centaines d’heures, au moins, à monter et démonter le monde au gré de mon imagination. Souvenir dramatique aussi lorsque – prélude d’un 11 septembre à venir – la foudre s’abattit à côté des la maison de mes cousins… et que notre tour, qui dépassait alors le mètre, vacilla, de gauche et de droit, s’effondra finalement. La foudre ne nous avait rien fait… mais à la chute de la tour, nous avons dévalé l’escalier quatre à quatre. Conscients de la gravité de l’instant et du danger !
D’autres étaient Mecano. Et chez eux nous avons sans relâche boulonné, déboulonné, assemblé des dizaines de mètres de métal. Au mépris de toutes les tentatives de records. Montant et démontant. Sans soucis d’efficacité. Pour notre seul plaisir.
Nous avons toléré la tuile Lego. Censée représenter un toit. Il n’y en avait jamais assez. Ou bien alors, pas de la bonne taille. Mais, au pire au moins, on pouvait en faire autre chose. L’avant d’un brise glace. Le chapeau d’un géant. Le rail aussi, nous l’avons apprécié. Bleu. Il introduisait un peu de variété dans notre palette limitée. Et par sa longueur il ouvrait à d’autres représentations. Mais nous en avons surtout fait des missiles. Qui franchissaient réellement l’espace par la puissance d’un élastique.
Ma tête, mon cœur et mes mains se sont fermés quand sont apparus les jeux de construction modernes : Knex, Lego technix, et tous leurs avatars. 353 pièces, pas une de plus, pas une de moins. 45 éléments différents. Suivez le plan. Suivez le guide. Fermez vos esprits. Abandonnez l’imagination. L’idéogramme a remplacé l’alphabet. 40.000 pièces différentes, assemblées suivant des règles prescrites, permettront de faire ce qu’il est prescrit, là où il est prescrit de le faire !

jeudi 17 juillet 2008

Jeans

Imagineriez-vous un monde sans Jeans ?

Il me semble pourtant que j’ai du attendre au moins mes douze ans pour porter mes premiers Jeans. Et encore étaient-ils blancs. Pour travailler au restaurant de ma tante. De mes premiers blue Jeans, je ne m’en souviens pas vraiment. Sauf qu’ils étaient horribles. Un vêtement de travail. Pas du tout l’objet de mode actuel.
Mais je vous l’assure. La vie était possible sans Jeans !

mercredi 16 juillet 2008

Insecticide

Plaques Vapona, bombes… j’ai vécu l’âge d’or de l’insecticide je crois !

Avant nous, il y avait eu le DDT. Poison, mais salvateur aussi. Pour des populations qui sortaient de la guerre couvertes de poux. Affaiblies et attaquées par des nuées de parasites. Mais bon, on s’était quand même rendu compte que le DDT n’était pas aussi bénéfique qu’il n’était toxique. Et qu’il devait y avoir moyen de faire mieux.
Avant nous aussi, le vaporisateur à pompe ! De la bande dessinée seulement. Un peu comme le train à vapeur – sauf que le train à vapeur, lui, on l’avait vu, on le voyait encore occasionnellement – juste comme une icône, un symbole. Une sorte d’idéogramme. De logo dirait-on !
Non, aucun des deux, mon époque fut celle de la plaque Vapona et de la bombe insecticide.
La plaque Vapona, jaune orange, rectangulaire. Pendant dans les maisons. Dégageant un fort parfum de propre et d’interdit aux mouches. Et ça marchait. Mais apparemment, ça marchait un peu trop bien. Et ce n’étaient pas seulement les mouches qui prenaient leur plein de Vapona ! On l’a vue partout… et puis, un jour, on ne l’a plus vue nulle part. Sauf dans les magasins. Où je ne sais quel spécialiste du marketing obstiné continuait à vouloir l’imposer.
La bombe surtout… avec plein de gaz destructeurs de la couche d’ozone en prime. La bombe ? Des bombes. Pleins de bombes vidées à la poursuite des mouches, moustiques, abeille et guêpes dans toutes les maisons. Bombez, bombez… La bombe à la main on se sentait justicier. On poursuivait le moustique hors la loi. La guêpe terroriste. On s’en prenait plein les narines, de cet insecticide… On se sentait fier et fort dans une maison débarrassée de ces intrus.

Dans le même temps, les rapaces, même les plus communs se raréfiaient. Il fallait aller dans les Vosges, pour rencontrer le premier faucon pèlerin – qui niche aujourd’hui au centre de Bruxelles – qui - fatigué sans doute de pondre et couver pour rien - en oubliait même de nicher. Chaque année, on observait avec horreur, le trou dans la couche d’ozone s’élargir, s’étendre comme une peste de plus en plus vers le sud.
Aujourd’hui pend dans ma cuisine, un de ces horribles papiers tue mouche, que nous trouvions archaïques alors. La seule différence ? On a jeté la plaque Vapona aux oubliettes de l’histoire. Vapona vend aujourd’hui le papier tue mouches !

mardi 15 juillet 2008

Hanneton

Bruns, comme une châtaigne, des antennes comme des râteaux,… si j’ai vu 5 hannetons de ma vie, c’est beaucoup !

Et pourtant on disait qu’il envahissait parfois les arbres – les hêtres je crois -. On le disait nuisible. Je ne l’ai trouvé que sympathique. Amical. Un corps de scarabée, et puis ces antennes bizarres. Design !

lundi 14 juillet 2008

Garde barrière

Je suis arrivé trop tard. La barrière était encore là. La maison du garde barrière aussi. Mais lui avait été remplacé par un système automatique.

Là où la route rencontrait la voie ferrée, il avait la croix de Saint André. Ses feux rouges qui clignotaient pour annoncer la fermeture de la barrière. Rouge et blanc. La sonnerie du signal aussi.
La voiture s’arrêtait dans la campagne. Le regard se tournait alors, au bord de la route, vers la clôture blanche, la maison, blanche aussi. Petite, comme une sorte de maison de poupée. Les bacs de fleur aux fenêtres. Le pignon surplombant les rails.
J’aurais voulu en voir sortir la garde-barrière. Par tous les temps, à heure fixe, descendre à grands tours de manivelle, la barrière. Puis, le train passé, la remonter. La saluer de la main. Je l’ai peut être fait !

dimanche 13 juillet 2008

Foins

Les foins : on était plus nombreux à les faire plutôt que d’en avoir le rhume !

Le petit fermier d’en face d’abord. Que je vois encore sur son petit tracteur. Ou son fils. A la barre faucheuse longtemps. Plus tard à la faucheuse à disque. Tondre leurs minuscules prairies et y ériger quelques meules quand le foin y serait à peu près sec.
Plus tard, alors que nous habitions sur les hauteurs de la ville, ces visites impromptues du fermier voisin. A la recherche de bras lorsque la pluie menaçait. Il faut dire qu’il ne suffisait pas à l’époque d’un tracteur ou deux de plus, pour charger d’immenses balles ou des rouleaux – quand on ne les laisse pas simplement sur la prairie, enrobés de plastique – à la force hydraulique. C’est bien d’huile de bras qu’il fallait alors. Pour parcourir la prairie d’un pas rapide. Planter sa fourche dans un ballot. Le lever pour le passer à ceux qui chargeaient le char à foin. Lever de plus en plus haut. A bout de bras enfin, le souffle court, les jambes tremblantes, des ballots des plus en plus lourds.
Mais la fin du travail arrivait toujours. Alors que la poussière du foin était comme du papier de verre sur nos fronts et nos bras. Nos mouchoirs – de tissus évidemment – s’emplissaient d’une morve presque aussi noire que celle d’un mineur. Le repas du soir se prenait à la ferme. D’énormes tranches de pain couvertes de charcuteries et de fromages. De grandes goulées de sirop de sureau et de bière. D’eau aussi. Pour tenter de rendre à notre corps tous ces litres qu’il avait sués sous le soleil brulant. Dans la touffeur d’avant l’orage. Qui viendrait ou qui ne viendrait pas ! Mais peu importe, puisque les foins étaient rentrés.

samedi 12 juillet 2008

Expo 67

Evidemment, l’expo 58 a été importante. Mais je ne me souviens que ce celle de 67, à Montréal !

Les deux ont marqué ma vie. La première par ma naissance. La seconde, par l’arrivée de la télévision.
Je me souviens seulement vaguement des images de l’époque. De ces batiments futuristes. De ces travellings interminables dans un monde plus étrange encore que les rares films de science fiction de l’époque.
Mais franchement, ce n’était pas notre premier souci !
Nous regardions plutôt la télévision elle-même. Ce mastodonte de bois et de verre. Sur une table à roulettes hyper moderne, aux pattes d’insecte. Tellement haute et tellement moderne qu’au bout d’une semaine – mais peut-être sont-ce six mois – la table, et la télévision avec elle, s’est cassé la figure.
En fait, j’ai longtemps cru qu’on avait acheté la télévision pour l’expo 67 !

vendredi 11 juillet 2008

Dos

Le curé tournait le dos au public. Distant. Presque méprisant pour l’assemblée. Le rite le voulait !

A la messe, il y avait d’abord le latin. Ne me demandez pas comment – moi qui n’arrive pas à retenir un numéro de téléphone -, mais j’ai encore dans la tête des phrases complètes que j’ai entendues alors… Du temps de la messe en latin. Il y a donc très, très longtemps. Sans doute avec bien des fautes. Celles que fait un gamin qui entend quelque chose à laquelle il ne comprend rien. Mais des relents phrases entières, avec l’intonation qui les accompagne. J’aimais en particulier la musicalité du « est tibi Deo Patri omnipotenti, in unitate Spiritus Sancti, omnis honor et gloria… »
La soutane ? Ce n’était pas différent. Pour les acolytes et autres adjoints sans doute. On les voit le plus souvent en civil maintenant, ce qui n’était pas le cas.
Le sexe des assistants ? Evidemment, à l’époque, les femmes étaient juste bonnes à prier et à nettoyer. Quant à servir la communion ou assister le prêtre dans la cérémonie, il n’en était pas question. Il a fallu sans doute que les églises se vident pour qu’on les en juge enfin dignes !
Il y avait la barrière aussi… On s’agenouillait devant, pour recevoir la communion. Elle marquait aussi clairement la distance qu’il y avait entre le prêtre – et ses acolytes – et le peuple. Les uns dans un monde sacré, les autres dans le monde terrestre.
Mais franchement, comme si la barrière ne suffisait pas, fallait-il vraiment que l’autel se trouve encore bien loin, tout au fond du cœur. Et que, non content de ne pas participer à la communauté, le prêtre lui tourne aussi le dos. Rétrospectivement, il me fait l’effet d’un officiant Aztèque, sur sa pyramide sanglante, et l’or du calice celui d’un couteau sacrificiel.

jeudi 10 juillet 2008

Caniche

Un caniche, c’est un chien qui serait coiffé comme une femme !

Un certain type de femme évidemment. Et d’une certaine époque.
Le milieu du corps rasé… les pattes aussi, mais pas les pieds. Des tas de poils autour de la tête… et comme des bottes de fourrure.
On regardait toujours la propriétaire ensuite – jamais un propriétaire, ou alors c’était juste monsieur qui sortait le chien de madame -. Une vieille souvent. Pas bien comique. Mais quand c’était une plus jeune, ça ne ratait jamais : la propriétaire ressemblait à son chien. Une boule de cheveux bouclés, de grandes lunettes, et les vêtements qui vont avec.
Bizarre. On ne rase plus les caniches !

mercredi 9 juillet 2008

Belgavox

Les actualités Belgavox, c’était notre Radio Londres à nous !

Difficile à faire comprendre à l’amateur de cinéma d’aujourd’hui qu’on allait voir le cinéma dans une salle. Toujours ! Pas de vidéo, pas de DVD. La télévision, c’était surtout pour les vieux films. Les westerns par exemple.
Un peu plus difficile encore de faire comprendre qu’on avait plusieurs films. Et pas de publicité ! Un court métrage. Ou bien les actualités Belgavox. Une sorte de journal filmé. Avec un commentaire lénifiant. Rien que d’y penser, j’ai l’impression de venir d’une autre planète ! Je me pincerais presque pour être certain de ne pas avoir rêvé ce souvenir !

mardi 8 juillet 2008

Aniline

Ignorant le danger, avec un peu de salive, le facteur humectait son crayon à l’aniline.

Indélébile, c’était l’instrument du facteur. Pour les documents importants. Les recommandés. Les colis… Toxique surtout. Le facteur savait qu’il ne fallait pas le mettre en bouche. Mais le faisait quand même. Finalement, on l’a interdit.
Moins spectaculaires quand même que la cire à cacheter. Elle aussi a disparu. Même pour les paquets de bulletins de vote, après le dépouillement des élections, on ne l’utilise plus depuis récemment.

lundi 7 juillet 2008

Zoo d'Anvers

L’excursion au zoo d’Anvers était incontournable. Mais qu’en retiendrait-on ?

Oublions la boutique, voulez-vous. Elle n’a rien de plus, ou de moins, que n’importe quelle boutique de lieu touristique. On s’y arrête. On y achète. Juste parce qu’on est là. Parce qu’on est en excursion et qu’acheter à la boutique de l’endroit visité fait partie du rituel.
Restent alors, des couleurs, et des odeurs.
Par exemple, celle des singes – obsédante -. Je pourrais d'ailleurs m'arrêter là. Terminer ainsi ma visite du Zoo d'Anvers. Le résumer à la seule odeur des primates.
Mais continuons. Celles de la maison des éléphants, des girafes. Un zoo se visite au moins autant avec le nez qu’avec les yeux. Crottin et urine font partie de l’image que nous nous faisons de ses habitants. Même les cages des oiseaux ou l’enclos des flamants (roses) laissent une trace olfactive dans nos mémoires.
Odeur encore au delphinarium. C’est le même bleu qu’à la piscine. La même humidité. Les même plaisir et presque les mêmes cris. Ce sont des plongeons plus spectaculaires. Mais, c’est aussi une odeur. Une odeur d’eau bleue avec du soleil dessus. Chaude. Pas comme celle des ours blancs. Au delphinarium aussi, on entre avec son nez.
Des couleurs enfin… toutes résumées dans le pavillon des girafes. Ces décorations arabisantes. Exotiques. Avec des échos art nouveau.
Somme toute… au zoo d’Anvers, les animaux ne sont pas l’essentiel !

dimanche 6 juillet 2008

Yo-yo

Hula hop, osselets, yoyo, cerceau, toupie… bizarre comme certaines époques peuvent échapper à certains jeux éternels. Nous avons à peine joué aux billes !

Aurais-je vécu une époque si particulière, ou bien étais-je aveugle alors ? Mais aucun de ces jeux, que l’on dit éternels parce qu’ils reviennent régulièrement, n’a eu son heure de gloire lorsque j’étais gamin.
Le vélo. Comme moyen de déplacement d’abord. Comme jeu parfois.
Les voitures miniatures. Nous avons passé des journées, qui font sans doute des mois et des années si on les additionne, sur les bordures à leur faire faire la course.
Les armes. Elles n’étaient pas interdites alors… et armés jusqu’aux dents, lorsque nous ne faisions pas de courses – de voitures ou en vélo – c’est que nous faisions la guerre.
Le foot, évidemment. Au milieu de la rue. Prêts à nous replier lorsqu’apparaissait, rugissant, le camion de la laiterie.
Mais, j’ai beau chercher… mon petit frère a ramené des osselets de colonies de vacances. J’étais trop vieux pour apprendre. J’ai bien eu un yo-yo, mais je n’ai jamais fait école… pas plus que d’autres n’auront pu me montrer qu’il y avait moyen de faire bien mieux que de – stupidement – le faire monter et descendre sur son fil. Hula hop ? Trop rock des sixties. Le cerceau ? Ridicule. On se serait cru dans une histoire de Bécassine. La toupie ? Pour les bébés. Les billes ? Je ne me souviens pas avoir assisté à une seule compétition entre gosses. On en avait, et puis c’était tout.
Non, franchement… c’est à se demander ce qu’avait mon époque pour avoir échappé à tous ces classiques !

samedi 5 juillet 2008

Xhoute si plout

Il habite à Xhoute si plout !

Prononcer "Hoûte si ploût". Ecoute s'il pleut ! Quel nom bizarre pour un lieu...
Habiter à Xhoute si plout… aller à Xhoute si plout… venir de Xhoute si plout… c’est quand même plus joli qu’habiter (aller à, venir de) « je ne sais où » ou « n'importe où »… Plus couleur locale que « le bled ». Même si l’intention était la même.
Ce que nous ne savions pas alors – ou ne voulions pas savoir – c’est que le lieu existait bien. Les lieux faudrait-il dire. Puisqu’il y en avait deux au moins à moins de cinquante kilomètres de chez moi…
L’expression m’est d’autant plus chère depuis que j’ai appris qu’il y avait des Xhoute si plout un peu partout en France : Escota si plau dans le Béarn, Escoute s'il plot en Ardèche. Et qu’ils font tous référence à la nécessité pour le propriétaire d’un moulin à eau d’attendre la pluie.
La poésie du language se cache derrière les exigences les plus triviales.

vendredi 4 juillet 2008

Warchenne

Warche et Warchenne n’étaient pas les bienvenues. Utilisées par l’industrie, sans doute. Pour le reste, craintes, et tolérées seulement.

A Saint-Louis, sur mon île du milieu du fleuve Sénégal, je me suis émerveillé de vivre, non seulement au bord de la mer, mais surtout au bord – et au milieu - d’un fleuve. Et au cours de mes voyages, je ne peux m’empêcher de trouver toujours un charme particulier aux villes qui se mirent dans un cours d’eau. Malmédy, elle, tourne le dos à ses deux rivières !
La Warche, elle ne peut – ne pouvait - trop l’ignorer, qui baignait ses papeteries et tanneries. Mais la Warchenne ?
Furtive. Venant de nulle part. D’une vallée, au bout de l’avenue Montbijou, qu’on s’étonne presque de trouver là. Trop verte. Trop naturelle. Et puis, entrant dans la ville sous ce pont cassé. Cassé depuis toujours aussi. N’intéressant personne. Disparu peut-être avec la construction du supermarché. Il y a deux décennies au moins. Hésitant ensuite. Se résignant enfin, la Warchenne n’irait pas vraiment en ville. Se faufilerait entre les maisons, derrière l’école, derrière le parc. Toujours derrière : l’école, les maisons, le parc, la ville lui tournent le dos !
Battue enfin, se jetant dans la Warche sans gloire et sans témoins. Son embouchure n’intéresserait personne.
Mais laissez la donc à sa discrétion naturelle. En pleine ville j’ai encore vu cette année la truite et le cincle plongeur. J’ai même vu des gamins y pêcher !

jeudi 3 juillet 2008

Velours

En hiver, nous portions des pantalons de velours.

Comment aurais-je pu imaginer alors qu’il me faudrait expliquer ce qu’est le velours ? Imaginez-vous aujourd’hui devoir expliquer à vos enfants et petits enfants, dans trente, quarante ou cinquante ans, ce qu’est un jeans ? un string ? une télécommande ? un changement de vitesse ? Et bien, préparez vous !
Parce que le velours, c’était important ! On trouvait ça beau. C’était chaud, mais pas trop. C’était doux. Je parle bien du velours côtelé. De celui avec des rayures.
Ma mère nous en faisait parfois aussi des « plaques de rat ». Nous appelions ainsi les appliques de tissus pour renforcer les coudes de tel ou tel pull à la laine un peu fatiguée – prétendant qu’elles étaient faites en peau de rat -.
Il y avait du velours un peu partout.

mercredi 2 juillet 2008

Unigro

Le catalogue Unigro était indispensable ! C’était le seul qui permettait de faire de bonnes flèches de sarbacane.

Arrachez une feuille du catalogue. Roulez-la autour de votre index de la main droite, tout en maintenant de la main gauche son autre extrémité pour en faire une pointe. Ni trop fine – elle ne profitera pas de tout votre souffle – ni trop grosse – vous serez obligé de la couper – léchez le bord de la feuille pour sceller votre cône de papier.
Enfilez votre flèche dans les précédentes et recommencez.
Avec une vingtaine de flèches, vous êtes prêt pour le combat. Il sera toujours possible de ramasser celles des ennemis pour les leur renvoyer.
Bien rangées dans votre carquois. La sarbacane – un tube pour câble électriques coupé à la bonne longueur - en main, vous vous lancez sur le sentier de la guerre.

mardi 1 juillet 2008

Tanneries

A leur retour, les touristes semblaient n’avoir retenu que la puanteur des tanneries marocaines. La Warche n’était pas si loin que le Maroc !

A Malmédy, il y avait d’abord les anciennes tanneries. Marquant l’entrée de la ville, comme une muraille historique, elles exhibaient leurs colombages et leur ruine. Spectaculaires. Historiques. Je comprends difficilement aujourd’hui qu’on ait autorisé leur disparition. C’est une tout autre ville qu’on donnerait aujourd’hui à voir. Reste donc le souvenir seulement.
Les tanneries en activité ensuite. Laides comme des usines de ce temps là. Sales aussi. On n’en voyait pas grand-chose. Quelques charriots de peau parfois. Un camion qui entre ou qui sort. Des déchets surtout. Entre vert et bleu. Dégageant une odeur obsédante de bassin de décantation. Tout autour de la tannerie la même couleur… sur les quelques fleurs rachitiques qui survivaient… sur les ponts… sur les murs… Dans la rivière et sur ses rives. La Warche prenait des apparences de cours d’eau d’après cataclysme : au lieu de fleurs, des rhubarbes sauvages ; au lieu de poissons, quelques lambeaux de cuir ; et pour tous oiseaux des corneilles à la chasse aux rats !
Aujourd’hui enfin, il n’en reste plus rien. L’odeur est partie. La couleur avec elle. L’emploi, l’espoir de quelque richesse aussi. Bientôt, tout le monde aura oublié !