vendredi 25 avril 2008

Incendies

Nous adorions les incendies !

La ville était parsemée de sirènes publiques, destinées à appeler les pompiers volontaires au service - et puis aussi, on ne sait jamais, à avertir la population en cas de bombardement -. A la première sonnerie, nous sautions sur nos vélos. Guettions le pin-pon du camion des pompiers, qui nous indiquerait quelle direction il allait prendre. Vérifions si par hasard aucune fumée n’était visible au dessus de l’horizon, désignant un incendie dans l’une ou l’autre vallée proche.
Et puis, quelques instants plus tard, fusait le premier bolide rouge. Rapidement suivi d’un ou deux autres. Et au milieu, une bande de gosses, pédalant comme des dératés, impatients de rejoindre les lieux du sinistre.
S’agissait-il d’une maison, il n’y avait pas vraiment de raison de se réjouir. Moins encore d’occasion de participer au travail d’extinction. C’était là une chose sérieuse, grave, dans laquelle nous sentions que nous n’aurions pas notre place. Nous nous tenions alors à bonne distance. Et quittions les lieux dès que nous savions de quoi il s’agissait. Au moins, nous aurions pédalé tout notre saoul.
Mais lorsqu’il s’agissait d’un bois ou d'un bout de lande, nous étions à la fête. Et il ne serait venu à l’idée de personne de nous éloigner des lieux du sinistre. Il fallait parfois porter les tuyaux – dans les bois et les talus -, en assistance aux pompiers qui affrontaient les flammes, et pouvaient difficilement contrôler cet encombrant reptile. Ou bien, plus amusant encore, nous étions dans la ligne de front. Une branche feuillue à la main, un mouchoir noué sur la bouche si la fumée était trop forte. Battant comme des fous les flammes rugissantes, nous lançant comme des chevaliers du temps jadis à l’assaut du feu, puis des brasiers résiduels, enfin des quelques flammèches qui résistaient.
Nous rentrions à la maison noirs de suie et fourbus. Mais toujours, un sourire éclatant témoignait de la bonne journée que nous venions de passer ! Et pas besoin de rêver d’un jour devenir pompier. Nous l’étions déjà !

jeudi 24 avril 2008

Huile de foie de morue

L’huile de foie de morue c’est vraiment dégueulasse !

Une véritable horreur. Un truc gluant et puant. Et il aurait peut-être fallu faire la file pour être servi, avoir sa dose, comme on le ferait pour une distribution de chiques ou de vitamines – ça au moins c’était bon, les vitamines ! -…
Tellement dégueulasse que même les pharmaciens s’en sont rendu compte et ont inventé la gélule d’huile de foie de morue. Un remède nettement moins rébarbatif… mais pas vraiment appétissant non plus. Au moins, avec une gorgée d’eau, la gélule était avalée… et pouvait disparaître au fond des entrailles pour y libérer – en même temps que ses relents d’origine – ses bienfaits prétendus.
Car, a en croire les anciens, sans cette huile de foie de morue, on ne passerait pas l’hiver… Sans elle, on deviendrait blancs comme des poireaux... On serait définitivement maigres et pâles...
Mais alors, si c’était si bon, si important et si vital finalement, pourquoi est-ce que eux, les adultes, n’en prenaient pas ?

mercredi 23 avril 2008

Gletter

Mange proprement ! Arrête de gletter partout !

Encore un de ces mots irremplaçables. De gletter, j’en ai plein la bouche rien qu’à le dire… et la salive déborde juste du plaisir d’entendre ce mot. Gletter, cela peut être aussi facile que de faire des châteaux de sable. Gletter, c’est comme manger des gaufres à la confiture. J’en glette de plaisir !
Mais, aussi, gletter, c’est simplement, ou salement, baver…
Si simplement ? N’entendez vous pas la bave dans le mot même ? Le génie d’une langue qui n’est pas qu’une série de sons et de mots alignés. Une langue pratique plutôt que savante. Des mots qui collent à la vie de ceux qui la disent. Qui disent le gras, la puanteur, et toutes ces sensations du corps là où elles sont et disent ce qui est…
Des mots physiques, charnels. De ceux qui se disent avec toute la bouche comme d’autre se disent avec un mouvement du corps, de la main ou du pied. A mille lieues de la langue pincée des salons.
Et qui au delà de la simplicité, de la brutalité ou de la vulgarité apparente font d'un mot si simple tout un concentré d'une expérience totale, qui nous replonge par la magie d'un mot évoqué dans un de ces instants où une voix exaspérée nous a dit: "Arrête de gletter !"

mardi 22 avril 2008

Fete Dieu

De la fête Dieu, je n’ai vu que des ailes. De ces accessoires d’angelot, en tulle, qui devaient être portées par ma petite voisine d’en face.

Mes parents, bien que très religieux à leur manière, n’y participaient pas. Estimant que c’était tant de carnaval et si peu de religion. La laissaient donc aux vrais carnavaleux, les Malmédiens.
En grattant un peu encore ce qu’il me reste de mémoire de ces jours là, il me semble tout de même capturer encore une image. Le carrefour du début de la rue Chemin Rue parsemé de pétales de rose.
Et ça, c’est certain. Ca ne date pas du carnaval !

lundi 21 avril 2008

Excursion

Spa, Chaudfontaine, Spontin. On dirait que les excursions aimaient les villes d’eau.

Ah, les excursions scolaires. Rituel annuel et obligatoire. Tellement annuelles et obligatoires qu’elles généraient tellement de cet ennui qu’elles prétendaient combattre.
J’ai beau tenter me souvenir d’une excursion intéressante et qui ne sue pas la banalité, ma mémoire est impuissante. La plaine de jeu de Henrichapelle… celle de Spontin… la tour Zimmer de Lier… le barrage d’Eupen et la chocolaterie Jacques… l’embouteillage (pas automobile… avec de vraies bouteilles) de Spa monopole… et la cascade de Coo évidemment. Seul peut être le zoo d’Anvers mérite-t-il une mention spéciale. Aura-t-il été tellement chargé d'odeurs dans le soleil d'un presque été, que je ne peux que m'en souvenir.
Le voyage en car poussif. Partir tôt, revenir tard, et rouler longtemps.
Châteaux ridicules, musées minables, il parait que cela aurait dû nous intéresser. Tellement nous intéresser d’ailleurs qu’aucun de mes instituteurs n’a jamais envisagé de préparer ces visites, ni de les évoquer par la suite dans nos leçons…
Désespérants surtout, ces longs moments passés auprès des boutiques de souvenirs. Dont certains faisaient grand usage, surtout pour démontrer à leurs camarades moins nantis, qu’eux, au moins, avaient de quoi s’offrir toutes ces horreurs dont aucun de nous n’aurait voulu… mais que tant ont quand même achetées pour ces mauvaises raisons.

dimanche 20 avril 2008

Diabolo

Il est fou, le fils des voisins. Il tirait sur notre façade. Et avec des diabolos en plus !

Le diabolo que l’on fait danser sur une corde, que l’on lance vers le ciel pour le rattraper au terme de figures tarabiscotées. Très peu pour nous. Cela faisait partie de l’imagerie ancienne. Un truc qui appartenait plutôt à Bécassine qu’à notre époque. Les écoles du cirque n'existaient pas encore. Et attendraient longtemps avant d'être à la mode.
Par contre, le diabolo que l’on charge dans une carabine à air comprimé… Ca c’était de l’actuel ! Et bien plus précis en tir à l’extérieur que les plombs simples utilisés sur les foires. Bien plus lourd et destructif aussi.
Car des carabines à air comprimé, certains en possédaient. Mon frère par exemple. Et nous les utilisions.
La plupart pour le tir à la cible. Infiniment moins cher quand on le pratiquait ainsi que sur les champs de foire. Au risque sur ceux-là de s’encombrer d’un nounours géant (rose de surcroit) ou d’être moqué par l’ensemble des spectateurs si chaque coup ne portait pas. Alors que nous faisions plus que soupçonner tous les gérants de tir de fausser les canon pour distribuer d'autant moins de lots - pourtant infames -.
Certains pour le tir aux pigeons… aux moineaux… et sur tout ce qui était petit et bougeait dans leur jardin. Jusqu’au jour où, peu contents de la réticence des oiseaux à encore venir se faire tuer chez eux, ils se mettaient à canarder le jardin des voisins. Cela se terminait immanquablement par un coup de sonnette rageur du voisin en question… d’une correction magistrale… et par la disparition définitive de la carabine à plomb…
Pour tous ceux que j’ai connus, c’est là que s’est arrêtée pour toujours une brève histoire de délinquance… et peut-être un brillant futur de tueur à gage !

samedi 19 avril 2008

Champion olympique

Certains ont voulu me faire croire que mon prof de gym était un champion olympique !

Nuance, il le fut presque…
Citation : « Le Malmédien Freddy Herbrandt, dont le principal adversaire est Roger Lespagnard, reste notre spécialiste numéro un du décathlon. Totalisant quinze titres nationaux dans cinq spécialités différentes, il réalise son plus bel exploit aux Jeux de Munich en 72. Au départ de la dernière épreuve, le 1500 mètres, il est toujours candidat au podium, finalement sixième. Son record national n'a pas encore été battu. » (Source : wallonie-en-ligne.net)
Mais franchement, nous, un presque champion cela nous impressionnait peu.
Gaston Roelants… lui était champion du monde et champion olympique ! Ou Serge Reding – trop tôt disparu - et sa bonne bouille sympathique. Même Emile Puttemans et Karel Lismont avaient ramené des médailles.
Alors, plutôt que de presque champions wallons, laissez moi plutôt me souvenir des vrais champions belges !